e cycle du mildiou ne s’arrête pas à la récolte des raisins. Bien au contraire. « Lorsque l’on suit la sporée aérienne, on observe des captures de spores très importantes en septembre et octobre. On assiste donc à une recrudescence de l’épidémie due à l’arrêt des traitements mais aussi au retour de conditions plus humides, favorables au parasite », indique François Delmotte, directeur du laboratoire santé et agroécologie du vignoble, à l’Inrae de Bordeaux.
C’est également à cette période que s’installe le mildiou mosaïque dans les feuilles de la vigne et que s’enclenche la reproduction sexuée du parasite. Une phase qui conduit à la formation des œufs d’hiver – la forme de conservation du parasite – , à l’origine des contaminations de l’année suivante.
Le mildiou mosaïque se caractérise par des petites taches polygonales, de couleur jaune à brun-rouge, parfois nécrotiques, délimitées par les nervures. Il se développe sur les feuilles âgées. C’est à l’intérieur de feuilles atteintes par ce faciès que se forment les oospores, à la suite de la rencontre, via un système de reconnaissance hormonale, de deux gamètes provenant de deux individus de type sexuel opposé (P1 ou P2).
« Les oospores sont invisibles à l’œil nu, détaille le chercheur. Prises dans les feuilles, elles ne voyagent pas et tombent avec elles au sol où elles s’accumulent. Comme on laisse le mildiou se développer en fin de saison, on engrange ainsi un inoculum primaire qui s’accumule dans le sol chaque année. Ces oospores sont capables de germer pendant au moins quatre ou cinq ans et peut-être plus. Leur stock augmente donc année après année, comme c’est le cas pour les graines des plantes invasives. N’oublions pas que le mildiou est une algue. »
Le mildiou enclenche son cycle sexué quand les jours raccourcissent et que les températures baissent. « En laboratoire, nous avons observé que plus les feuilles sont âgées, plus il s’y forme d’oospores. Pourquoi ? Nous l’ignorons. Nous avons aussi noté que l’on obtient davantage d’oospores à 10 °C qu’à 20 °C », détaille François Delmotte.
Plus surprenant encore, les chercheurs ont observé que des oospores se formaient également dans les feuilles âgées des variétés résistantes. « Certes, ces variétés résistent au mildiou en saison, mais à l’automne, elles n’empêchent pas la formation de l’inoculum primaire du mildiou », assure François Delmotte. Encore un impact à ne pas négliger.
« Les anciens disaient qu’il fallait faire un traitement après la récolte pour réduire la présence du mildiou sur les vignes (et la formation de l’inoculum primaire) », rappelle François Delmotte. Mais de telles applications ne sont plus dans l’ère du temps. Dans le cadre de la chaire Alexis Millardet (Fondation Bordeaux Université), les chercheurs de l’ISVV explorent donc d’autres voies pour réduire l’inoculum primaire, notamment la confusion sexuelle du mildiou pour empêcher la formation des oospores. Ils testent également la défoliation des vignes à l’automne puis le compostage de ces feuilles pour éliminer les oospores. Une idée qui n’est pas nouvelle puisque le ramassage des feuilles en vue de les brûler avait déjà été proposé par Émile Masson à la fin du XIXe siècle ! Pour finir, ils étudient le microbiote du sol pour voir s’il n’y aurait pas des micro-organismes, voire macro, antagonistes capables de détruire les oospores.