ans les sphères politiques des deux côtés, on a vanté les mérites d’un accord de référence qui permettra de faire venir une plus grande diversité de produits australiens et néo-zélandais à des prix plus abordables. Mais, en dehors de l’élimination du fameux formulaire VI-1, rien n’est moins sûr au regard des gains réels : 1 AUD (soit 0,63 euro) le carton de six bouteilles. En effet, l’économie se traduit par une baisse de l’ordre de 10 centimes d’euro par bouteille, un gain qui fait pâle figure lorsqu’on le compare à des hausses stratosphériques des coûts à tous les niveaux, et à la prochaine hausse des accises. « C’est ridicule », acquiesce Stuart McCloskey, fondateur et dirigeant de la société The Vinorium, qui se singularise par sa spécialisation, 98% de son activité portant sur l’importation et la commercialisation de vins australiens. « Dès le 1er août, un vin tranquille titrant entre 11,5 et 14,5% va augmenter de 53 pence [soit 62 cts], TVA incluse, et la hausse atteint 97 pence pour un vin titrant 15% et plus, donc un gain de 9 pence par bouteille ne sert à rien ». Cela, d’autant plus que des importateurs comme lui ont été matraqués par des hausses de prix sur le fret, les frais de manutention dans les ports et de mise sous douane, les coûts de livraison au Royaume-Uni et de conditionnement. Sans parler des délais d’expédition et de manque de place sur les navires, aggravés par les tensions géopolitiques entre la Chine et l’Australie.
Mais pour l’importateur britannique, à la tête d’une entreprise qui propose quelque 300 références de vins australiens dont le prix moyen de vente dépasse 30£ [soit 35 euros) pour un chiffre d’affaires annuel de l’ordre de 3£ millions, le défi se trouve désormais ailleurs. « Au cours des deux dernières années, nous avons eu quasiment le pire des scénarios, puis sont arrivés le conflit en Ukraine et surtout la crise du pouvoir d’achat ». Après avoir tenté d’absorber les différentes hausses de prix, l’importateur a décidé de répercuter intégralement une augmentation de 10% appliquée par l’un de ses fournisseurs fleurons – The Standish, régulièrement noté entre 98 et 100 points par la critique. « Avant la guerre en Ukraine, nous en vendions environ 11 palettes au prix de 30£ la bouteille. Il y a deux semaines, nous en avons proposé en prévente et en avons vendu deux palettes ». C’est dire si la hausse des taux d’intérêt et du coût général de la vie commence à se faire sentir outre-Manche. « Nous avons vraiment pris conscience du fait qu’il faudra attendre longtemps pour que les ventes retrouvent leur niveau d’il y a deux ans, lorsqu’elles ont été portées par le commerce électronique notamment. Cette année est beaucoup plus difficile que l’an dernier et je pense que l’an prochain pourrait être encore plus dur. Le vin est devenu un produit super luxe dont beaucoup de gens peuvent se passer ».
Et d’après l’importateur, qui a participé à la campagne des Primeurs de Bordeaux pendant 17 millésimes, les vins australiens ne sont pas les seuls concernés : « La campagne des primeurs bat son plein et lorsqu’on voit les prix que proposent les Bordelais, c’est risible. On entend le dialogue et le ton de certains importateurs, mais on voit aussi l’absence de ventes. Les Bordelais ont toujours fait preuve d’une certaine arrogance où ils font fi de la situation générale, mais les prix sont absurdes et je sais que beaucoup de professionnels n’en vendent pas ». Il faut dire aussi que le Brexit est passé par là, entraînant non seulement un casse-tête logistique et administratif, mais aussi la perte d’affaires sur le continent européen. « Pour notre part, nous vendions à quelque 1 800 clients particuliers en Europe continentale, leur proposant une expédition sous trois jours pour des frais de livraison de quelque 20£ la caisse de 12 bouteilles. Cette activité, qui nous rapportait environ 1£ million, n’existe plus parce qu’il est désormais impossible d’expédier des vins vers l’Europe continentale ».
Quant à l’impact général de l’augmentation des accises dès le mois d’août, les vins premium seront sans doute peu touchés. « Le prix final de nos vins étant relativement élevé, je ne pense pas que nous serons très impactés. En revanche, pour les supermarchés et les importations de vins en vrac commercialisés autour de 5-6£ la bouteille – ce qui représente le plus gros des importations australiennes – la différence sera sans doute très importante ».