a-t-il un pilote dans l’irrigation ? Oui, avec les sondes capacitives connectées qui mesurent la réserve en eau des sols et adressent cette information sur le smartphone de leurs utilisateurs. « Cela fait deux ans que nous avons installé une sonde Météus dans une parcelle, décrit Jérôme Vache, viticulteur à Sarrians, en appellation Vacqueyras, dans le Vaucluse. Je peux démarrer l’irrigation quand la réserve d’eau franchit le seuil défini comme trop bas. »
Dans les Pyrénées-Orientales, au Domaine Lafage, le chef de culture Antoine Lespès utilise deux sondes Corhize pour la deuxième année. « Elles fonctionnent plutôt bien dans notre objectif d’identifier le démarrage de l’irrigation, qui est primordial pour nous. » Même intérêt pour Denis Caboulet, ingénieur agronome de l’IFV dans l’Aude, qui suit une sonde Aquacheck depuis trois ans et des Decagon depuis quatre ans.
Cependant, il faut un peu de patience. Mathieu Portelli, vigneron à la tête du Domaine de Codeval, à Fronton, en Haute-Garonne, explique : « La première saison sert à récolter des données et à caler le modèle. La sonde a été posée en mai 2022 dans un sol sec. Avant de pouvoir s’en servir pour l’irrigation, il faut qu’elle ait mesuré un sol saturé en eau. »
« Il faut absolument avoir la valeur d’humidité au maximum de la saturation du sol, abonde Denis Caboulet. Cela sur toute la hauteur mesurée par la sonde. Il faut aussi que le sol perturbé lors de la pose de la sonde se remette bien en place. »
Puis, vient le temps du pilotage de l’irrigation. La plupart des sondes capacitives pour vigne mesurent l’humidité du sol à six niveaux, tous les 10 cm, jusqu’à 60 cm de profondeur. « C’est là que se trouve la majeure partie du système racinaire, décrit Antoine Lespès. Dès que l’on descend en dessous de 50 % de réserve utile en eau, on déclenche les tours d’eau. Si ce seuil critique est dépassé, même avant le débourrement, on déclenche. On s’est équipé pour ne pas rater le début de l’irrigation, c’est prioritaire. » En cette année exceptionnellement sèche, au 1er juin, le Domaine Lafage a déjà réalisé quatre tours d’eau.
« Les infos sont remontées toutes les 15 minutes par réseau Sigfox, rapporte Denis Caboulet. Non seulement les sondes connectées nous donnent le signal de démarrage, mais en plus elles nous évitent de surirriguer en perdant de l’eau en deçà de 60 cm de profondeur. Cette année, nous avons commencé à irriguer dès la mi-avril à Roquefort-des-Corbières et à Ouveillan. Il n’a plu que 160 mm ces douze derniers mois ! Les sols étaient exceptionnellement secs et les apex en ralentissement de croissance avant la floraison. »
Chez Jérôme Vache, la sonde capacitive a aussi permis de commencer à temps. « Nous suivons l’humidité du sol sur l’application Aqualis. Dès qu’elle est proche du seuil déterminé par un ingénieur agronome d’Isagri, on déclenche. L’an dernier, nous avons débuté l’irrigation le 26 juin, puis nous avons fait six tours d’eau. Et, dès qu’il pleut, on voit la courbe se relever et on reporte le tour d’eau prévu. »
Mais, tout n’est pas résolu. Pour Antoine Lespès, il faudrait tenir compte de l’humidité au-delà de 60 cm. « Dans cette logique, on fait des mesures de l’état hydrique de la vigne avec des chambres à pression. » Selon Jérôme Vache, le seul point négatif « est la lenteur de l’application smartphone à chaque démarrage. Le temps de chargement des informations est très long ». Toutefois, sans la sonde, « j’aurais fait comme mon père, des jours complets d’arrosage toutes les deux ou trois semaines, sans identifier le bon moment pour démarrer ni savoir quand le sol est saturé en eau », tempère-t-il.
« En plus de nous aider à déclencher au bon moment, les sondes capacitives connectées participent à limiter les à-coups de rendement, les années très déficitaires », souligne Denis Caboulet. Un équipement visiblement essentiel pour accompagner le goutte-à-goutte.
Les sondes capacitives connectées ouvrent un nouveau marché. Parmi les acteurs et distributeurs pour la vigne, on trouve par exemple Agralis, Brad – qui ne connaîtra ses premiers usagers que cette année –, Corhize, Isagri Météus, ou encore TCSD. Sencrop ou Weenat développent des partenariats. Les modèles Aquacheck ou Sentek sont les plus proposés. Côté prix, une sonde capacitive connectée coûte entre 600 et 2 000 €. Ajouter un forfait pour la communication des données.