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Le travail du sol dans les vignes alourdit le bilan carbone
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Désherbage
Le travail du sol dans les vignes alourdit le bilan carbone

L’IFV publie une étude de l’impact environnemental de l’entretien des sols. Si le désherbage mécanique présente un mauvais bilan carbone, c'est le désherbage chimique dont l'impact sur la qualité de l’eau est le plus important.
Par Pauline Orban Le 05 avril 2023
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Le travail du sol dans les vignes alourdit le bilan carbone
Emilie Adoir, Ingénieure en évaluation environnementale au sein de l’IFV. - crédit photo : DR
À

la demande de l’interprofession des vins de Bourgogne (BIVB), l’Institut Français de la Vigne et du Vin (IFV) a mené une enquête sur les pratiques d’entretien des sols dans cette région et déterminé leur impact environnemental. Émilie Adoir, et Hugo Luzi, ingénieurs en évaluation environnementale au sein de l’IFV, se sont chargés de ce travail. « Nous avons collecté les données sur vingt-deux domaines. Au total, nous avons étudié neuf modalités d’entretien des sols, les principales étant le désherbage chimique en plein, le travail intégral du sol, l’enherbement dans l’interrang combiné au désherbage chimique sous le rang, et l’enherbement dans l’interrang associé au travail mécanique sous le rang. Parmi les parcelles enherbées, certaines l’étaient totalement, d’autres seulement un rang sur deux », détaille Émilie Adoir.

Un grand nombre de facteurs pris en compte

Les deux ingénieurs se sont ensuite intéressés au bilan carbone de ces différents itinéraires. Grâce à leur outil de calcul GES & VIT, ils ont quantifié pour chaque modalité les émissions et le stockage du carbone, en kg de CO2/ha/an. Pour ce faire, ils ont pris en compte nombre de facteurs : la consommation de carburant, la fabrication et le transport des tracteurs, des outils, des herbicides, des semences, des engrais et même le déplacement de la main-d’œuvre.

Selon leurs calculs, « l’enherbement naturel dans l’interrang associé au désherbage chimique du rang est la modalité qui a le bilan carbone le plus bas, avec un stockage de 193 kg de CO2/ha/an », rapporte Émilie Adoir. Toutes les autres modalités aboutissent à une émission nette de carbone : 78 kg de CO2/ha/an avec le désherbage chimique total, 275 kg de CO2/ha/an avec le désherbage mécanique, et 434 kg de CO2/ha/an pour les vignobles avec enherbement de l’interrang et désherbage mécanique des rangs.

Pas de surprise

Le fait que le désherbage mécanique engendre une forte émission de carbone est un résultat sans surprise pour Nicolas Richarme, président de SudVinBio. « Le travail mécanique doit être raisonné, afin de limiter le nombre de passage du tracteur, argumente-t-il. Cela passe par un repos des sols en hiver, un investissement dans des tracteurs récents et peu polluants, et l’utilisation d’outils purement mécaniques. Les outils à dents sont beaucoup plus écologiques que les outils animés, gourmands en carburant et en huile hydraulique. »

Thomas Bouley, président de l’ODG de Volnay qui prône une interdiction, dès 2025, des herbicides dans les parcelles en 1er cru, se dit lui aussi pour « un labour raisonné. » « Tous ceux qui désherbent ont une empreinte carbone, avance-t-il. Elle est certes plus ou moins importante, mais l’arrêt des herbicides est aussi une question de santé publique. »

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Des pratiques difficilement comparables

Lors de leur enquête, les deux ingénieurs ont constaté non seulement que les pratiques sont très diverses, mais aussi qu’elles sont difficilement comparables. Au sein de leur échantillon, les exploitations qui combinent enherbement et désherbage mécanique sous le rang effectuent pour entretenir leurs vignes huit passages par an, quand celles qui combinent enherbement et désherbage chimique n’en font que quatre. Des différences davantage liées à l’organisation des exploitations qu’inhérentes aux techniques retenues.

Afin de comparer au mieux les modalités, Hugo Luzi et Émilie Adoir ont réitéré leurs calculs en fixant certains paramètres – nombre de passages, puissance de tracteur, densité de plantation – pour quatre itinéraires : tout chimique, tout mécanique, enherbement naturel un rang sur deux, enherbement naturel dans tous les rangs et, dans ces deux derniers cas, désherbage mécanique des rangs. Pour compléter leur exercice, ils ont considéré dans chacun des quatre cas que la pousse de l’herbe pouvait être faible, moyenne ou forte.

Résultats différents selon la pousse de l'herbe

Les résultats se révèlent alors bien différents. Pour une pousse moyenne de l’herbe, le bilan carbone de la modalité 100 % chimique est de 76 kg de CO2/ha/an, celui du tout mécanique est de 339 kg de CO2/ha/an et celui de l’itinéraire qui combine entretien mécanique des rangs et enherbement naturel de tous les rangs est de - 104 kg de CO2/ha/an.

Dans ce dernier cas, « la capture de carbone dans le sol par la bande enherbée est supérieure aux émissions de CO2 liées : on stocke 104 kg de CO2/ha/an », explique Émilie Adoir. Un résultat obtenu en considérant que l’enherbement naturel produit 1,5 t de matière sèche (MS) par hectare et par an. Et pour une pousse forte de l’herbe (3 t de MS/ha/an), les calculs indiquent un stockage de 436 kg de CO2/ha/an avec l’enherbement naturel des rangs et le désherbage mécanique des interrangs. Les vignes pourraient donc agir comme des puits de carbone.

Les vignes peuvent agir comme des puits de carbone

Nicolas Richarme émet quelques réserves à ce sujet. « Un enherbement trop important pose des problèmes de concurrence hydrique, souligne-t-il. S’il faut irriguer la vigne l’été pour compenser cette concurrence, la démarche n’a pas de sens. »

Le bilan carbone n’est qu’un aspect de l’impact environnemental du désherbage. Les ingénieurs de l’IFV ont également étudié les émissions de particules fines occasionnées par ce travail ainsi que son écotoxicité pour l’eau douce. Ils observent que les émissions de particules fines sont directement liées au nombre de passage de tracteur et à la consommation de carburant. Elles sont les plus faibles avec le désherbage chimique et les plus élevées pour ceux qui combinent enherbement naturel et enherbement semé. En revanche, c’est bien le désherbage chimique qui a le plus fort impact sur l’eau.

Reste que l’entretien du sol pèse peu. « À l’échelle du cycle de vie complet du vin, [il] ne représente qu’environ 5 % des impacts totaux, rappellent les auteurs de l’étude. Les principaux postes contributeurs à l’impact environnemental [sont] la fabrication de la bouteille en verre et l’expédition du vin. »

 

Un outil de calcul de l’empreinte carbone

L’IFV a mis au point GES & VIT, un outil de calcul de l’empreinte carbone, accessible en ligne à condition de souscrire à une licence annuelle. Cette application permet aux vignerons de réaliser un diagnostic de leurs émissions de gaz à effet de serre, depuis la production du raisin jusqu’à la mise en bouteille. Il suffit pour cela de renseigner votre itinéraire technique, le matériel utilisé, la densité de plantation, et l’outil estime de façon automatique les émissions de CO2 en kg/ha/an. L’objectif est simple : pouvoir identifier les itinéraires représentant le plus d'émission de gaz à effet de serre et, si possible, les réduire en mettant en place des stratégies alternatives.

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Tous les commentaires (5)
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pg Le 13 avril 2023 à 08:56:02
Je constate avec plaisir que Patrick Baudouin n' a pas perdu de sa fougue. C' est une bonne nouvelle. Cher Patrick , tu devrais relire l' article avec plus de distance. Tout ce que tu dis est écrit dans cet article. Même s'il enfonce des portes ouvertes, chacun peut en tirer des leçons pour son propre vignoble. La viticulture a un impacte sur l' environnement comme toute activité humaine. Il est nécessaire de trouver chez chacun de nous l' équilibre entre l' économie et l' environnement. La nature a une forte capacité d' adaptation. Nous , beaucoup moins . Nos vignes qui sont des anomalies écologiques depuis le 19eme siècle , encore moins. Je tiens a rappeler qu'elles aurais disparues depuis plus de 100 ans , si l' homme ne s' était évertué à les maintenir sous perfusion. La science nous permettra un jour , je l' espère, de se passer complètement des pesticides. On peut imaginer que des robots photovoltaïques entretiendrons le sol. Nous finirons par disposer de cépages de qualité, résistants aux maladies durablement. Donc , Patrick , ne t' énerve pas . L' avenir est devant nous et il me semble en bonne voie. Malheureusement , toi comme moi , la limite d' âge nous guète. Mais , nous l' aimons tellement ce métier, que je ne doute pas que dans 15 ans nous réagirons encore aux articles qui nous titillent ! Et , c' est tant mieux...
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Ra Le 09 avril 2023 à 08:52:07
Ce n'est pas une évaluation mais une acv qu'il faudrait faire ici sans compter que le travail du sol sert aussi à decompacter le sol après les multiples passages d'engins. Il y a quelques années il a été montré qu'une alternance enherbement / désherbage mécanique serait favorable et pour l'eau, la production et l'environnement.
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Chemi Le 06 avril 2023 à 14:43:34
Il serait intéressant de faire une comparaison bilan carbone entre le travail du sol et le nouveau desherbeur électrique (zasso).
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A.Lamblot Le 06 avril 2023 à 08:26:29
J'aimerai bien savoir si dans cette étude, on étudie enfin le bilan carbone de la production de la molécule chimique pour avoir une vraie étude complète. Car à ma connaissance, les firmes préfèrent payer des amendes que de publier le réel impact total.
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Patrick Baudouin Le 06 avril 2023 à 00:39:07
Les titres et les synthèses : comment biaiser les données d'une étude Le titre de cette étude de l'IFV porte sur le "mauvais" bilan carbone du travail du sol. Donc d'emblée le bilan essentiel de l'étude est donné. De quoi alimenter le biobashing montant.. Certes le chapeau indique tout de même "c'est le désherbage chimique dont l'impact sur la qualité de l?eau est le plus important." Mais tout l'article nous explique à quel point le bilan carbone du désherbage chimique est bien meilleur. Une seule ligne à la fin revient sur la question de l'eau. "En revanche, c?est bien le désherbage chimique qui a le plus fort impact sur l?eau" Enfin le dernier paragraphe indique que la question de l'entretien du sol n'entre que pour 5% dans le bilan carbone global de la profession. Au passage, rien sur le bilan carbone du travail du sol au cheval. La construction de l'article, du titre à la conclusion, est un petit bijou d'utilisation biaisée d'une étude. Car si le travail du sol ne compte que pour 5% dans le bilan carbone de la profession, la différence entre l'impact carbone des désherbants et du travail mécanique doit être de l'épaisseur d'une feuille de cigarette. Par contre, rien sur l'impact des désherbants sur la biomasse du sol, et les enjeux agronomiques, dont le tassement, la circulation de l'eau, etc... Mais surtout, quelle est l'importance relative du bilan carbone et de "l'impact sur l'eau", dont rien ne nous est dit : pollution de l'eau ? Sensibilité à l'érosion ? Quelle part ont les désherbants chimiques agricoles dans la pollution des eaux ? Bilan global du travail mécanique /désherbants chimiques, en mettant dans la balance le petit plus carbone du travail mécanique, et son monumental moins polluant dans son impact sur l'eau ?
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