’est la nouveauté la plus attendue de la saison en biocontrôle : la solution de pulvérisation de phéromones pour lutter contre eudémis par confusion sexuelle. Son nom : Exployo Vit. Signé M2i et distribué par Syngenta, ce produit se présente sous forme liquide et s’applique comme un fongicide. «Il renferme des milliards de microcapsules en suspension, faites d’huile végétale et de cire d’abeille, et qui contiennent la phéromone, dévoile Jean-Baptiste Drouillard, expert technique vigne chez Syngenta. Une fois fixées sur les feuilles et sur les grappes, elles jouent le rôle de microdiffuseurs», libérant progressivement la phéromone.
«Le principal intérêt est qu’on peut le positionner de manière raisonnée, seulement quand il y a un risque d’attaque.» Le technicien ajoute que ce liquide, «à l’odeur assez légère est facilement miscible, peut être mélangé avec un insecticide ou un fongicide et intégré dans un programme». Ces aspects sont censés «permettre d’étendre la confusion sexuelle à des exploitants qui, face aux contraintes d’un chantier de pose et de dépose, n’utilisent pas les diffuseurs classiques».
En pratique, Exployo Vit est utilisable sur les G2 et G3 de l’eudémis à raison de quatre applications au maximum par hectare et par an à la dose d’1l/ha. Son délai avant récolte est de 21 jours. Dans la plupart des situations, Jean-Baptiste Drouillard conseille «une application en G2 et deux applications en G3 en routine, la quatrième application autorisée permettant un renouvellement en cas de lessivage». Des préconisations qui dépendent bien sûr du vignoble et du nombre de générations. Comme pour la confusion classique, Syngenta recommande pour l’instant cette solution dans des îlots de plus de 4 ha, ainsi que dans «des parcelles de moins de 4 ha situées en zone confusée, mais qu’on n’arrive pas à relier à un chantier de pose». Seul bémol : «c’est un produit lessivable, au même titre qu’un produit de contact», reconnaît Jean-Baptiste Drouillard, qui nuance d’emblée : «Lors de périodes pluvieuses très longues, l’eudémis ne vole pas. En positionnant le produit de manière réfléchie, on peut donc éviter ce risque.»
De nombreux distributeurs ont testé cette solution en conditions réelles en 2022. Parmi eux, le charentais Ocealia, qui a comparé Exployo Vit à des boîtiers qui diffusent la phéromone de manière passive ainsi qu’à des Bacillus thurigiensis (Bt). «Exployo Vit est plutôt ressorti comme étant la modalité la plus efficace, mais sans valeur statistique», détaille Pascal Maran, responsable agronomique vigne chez Ocealia. En effet, «il faut tenir compte de la très faible pression des tordeuses dans le Cognaçais cette saison, du fait des conditions chaudes et sèches. La très faible pluviométrie n’a pas permis d’éprouver totalement le produit, dont le point faible est d’être lessivable au-delà de 20mm». Dans l’attente de données supplémentaires, le technicien a tout de même choisi de le référencer. «Il est intéressant pour le marché charentais, où eudémis est la tordeuse la plus présente, avec une deuxième génération qui traîne en longueur en juillet et août. Et il entre mieux dans la pratique viticole charentaise actuelle, qui n’a pas encore intégré la pose de diffuseurs dans l’organisation des travaux au printemps. Cette solution pulvérisable peut nous permettre de monter dans le train de la confusion en Charente.»
Dans l’Aude, Pascal Dupuy, de la coop d’appros Arterris, a aussi réalisé un essai encourageant dans le cadre du réseau expérimental InVivo. Chez un adhérent, il a comparé Exployo Vit (une application en G2 + une en G3) avec des diffuseurs classiques. Résultat : «Les comptages de perforations et de larves sont équivalents entre Exployo Vit et la référence de diffusion passive. Ce qui correspond à la tendance des autres essais du pool InVivo.» Certes, «cette solution est lessivable et nécessite un outil de modélisation ainsi qu’un suivi des vols et des dégâts pour son positionnement». Pour autant, le référent technique est tenté par un référencement. «Par rapport à la pose classique de diffuseurs au printemps, c’est une solution plus souple d’utilisation. Et, dans des situations de pression moindre, cela peut amener de la souplesse et de la réactivité.» Autre intérêt : «On pourrait l’envisager comme une solution complémentaire à la confusion classique dans les cas de très forte pression où celle-ci ne suffirait pas.» Et Pascal Dupuy de préciser qu’il ne s’agit que de «pistes de réflexion, car le produit est très récent. Il faut compiler davantage de données».