'Isifilpic, terme désigant un écarteur « Easy (facile, en anglais), fil, piquet », se fait rapidement une place parmi les écarteurs. À commencer par la Champagne où il est né l'hiver dernier. C'est Thomas Berger, vigneron à Troissy, dans la Marne, qui l'a créé. À la tête du champagne Gasmar, cet ingénieur packaging de formation propose, début 2022, à quelques proches de tester le nouvel écarteur qu'il a mis au point. Il s'agit d'une simple tige métallique aux extrémités formées de boucles destinées à recevoir les fils releveurs. Au milieu de l'écarteur, une autre boucle permet de l'accrocher aux encoches des piquets profilés tandis qu'une dernière boucle le bloque dans le creux des piquets.
« Dès le mois de mars, j'ai posé ces écarteurs sur une dizaine d'hectares. On les pose à la main ; il n'y a pas besoin d'outils. C'est facile, on va très vite », décrit Franck Théoff, responsable de secteur pour Vranken-Pommery. Depuis plusieurs années, cette maison travaille le sol sous les rangs et tond ses interlignes.
« Nous nous servions déjà de différents écarteurs pour les fils de relevage et les fils de pieds [releveurs spécifiques à la Champagne pour les brins poussant bas, NDLR], explique Franck Théoff.
Franck Théoff, responsable de secteur pour Vranken-Pommery a installé des écarteurs Isifilpic (Crédit Photo F. Théoff)
Avant l'Isifilpic, nous avions choisi un modèle SCDC à ressorts. Mais nous voulions aller vers un modèle plus simple et plus économique. C'est là que Thomas Berger m'a présenté son idée. L'un des gros avantages de l'Isifilpic, c'est qu'on le pose à la hauteur que l'on souhaite. On n'est pas embêté pour gérer le palissage des vignes touchées par le court-noué ou par le gel de printemps : on place l'écarteur à différentes hauteurs dans un même rang, suivant la pousse, ce qu'on ne peut pas faire avec les autres écarteurs car ils sont à poste fixe. Nous avons placé deux Isifilpic par piquet : un tout en bas pour les fils de pieds et un pour le relevage, en position de premier relevage. Puis, nous n'y avons plus touché. Et nous avons fait le deuxième relevage classiquement. Mais, cette année, nous remonterons une fois l'Isifilpic avant le dernier relevage pour mieux maintenir les brins. »
Plus commode, l'Isifilpic prend aussi moins de place que les autres écarteurs, étant moins large. Il dépasse de moins de 10 cm de part et d'autre des piquets. « Cela a diminué la casse au passage des enjambeurs. En ce qui concerne le coût, l'Isifilpic est presque trois fois moins cher que certains modèles concurrents. » Conséquence : « Pour cette saison, on va équiper de 6 à 10 hectares », lance Franck Théoff.
D'autres vignerons ont adopté l'Isifilpic. À l'image de David Faivre, à la tête de la maison éponyme, à Belval-sous-Châtillon, dans la Marne. « J'ai équipé le tiers de mes 5,5 hectares avec cet écarteur, dès le mois de mars, avant la pousse, commente-t-il. C'est une bonne formule. Avec l'Isifilpic, je mets le fil à une hauteur qui ne gêne pas le travail du sol et de manière à ce que les brins poussent directement à l'intérieur. C'est une nouvelle façon de travailler. Avant, on posait les releveurs au sol après le travail du sol en sortie d'hiver. On reculait leur détachage pour faire le travail du sol. Aujourd'hui, on peut installer les écarteurs Isifilpic plus tôt dans la saison. C'est un gain de temps. Pour le relevage aussi, on gagne du temps, car il est déjà fait partiellement : il y a juste à passer à l'intérieur les brins qui ont poussé à l'extérieur. »
David Faivre apprécie aussi la simplicité offerte par cet écarteur. « Les releveurs classiques, il faut les resserer avec des agrafes. Avec l'Isifilpic pas besoin. C'est moins de travail et les brins sont plus libres. La protection phytosanitaire est plus efficace car le feuillage est plus aéré, moins emmêlé. Quand je regarde le travail de mon pulvérisateur dans les rétroviseurs du tracteur, je vois bien la différence. »
Après avoir posé les écarteurs assez bas sur les piquets en début de saison, David Faivre les relève à deux reprises pour suivre la croissance de la vigne « au lieu de deux à trois passages habituellement, selon la parcelle et le cépage ». Ultime avantage, selon David Faivre : l'universalité du nouvel accessoire. « J'ai de vieux piquets, des larges, des courts, et l'Isifilpic s'adapte à tous. » Seul bémol : « il faut de la pédagogie avec les salariés releveurs palisseurs. Il faut donner plus d'explications sur la hauteur souhaitée des Isifilpic. Car c'est nouveau et c'est une autre façon de travailler. »
Pour Joël Follet, le premier intérêt d'Isifilpic réside dans la simplication qu'il apporte dans la gestion des fils de pieds. Spécifiques à la Champagne, ces releveurs doivent palisser les brins démarrant près du sol. « On a installé les écarteurs Isifilpic sur 1 hectare au total, partage ce vigneron, qui aide ses fils installés sur 4,5 ha à Belval-sous-Châtillon. Depuis, les fils de pieds ne sont plus jamais au sol dans cette parcelle. On peut toujours passer un intercep. On équipera d'autres parcelles, sauf les plus âgées car les piquets ne sont pas adaptés à cet écarteur. »
Il ne manque pas d'idées. Thomas Berger n’est pas seulement l'inventeur de l’écarteur Isifilpic. En 2012, il avait déjà conçu une nouvelle de caisse à vendange, la BJC50 (pour Berger Janvier Cohesis 50 kg), toujours commercialisée sous le nom de « Janvier » par Acolyance Vignes. Une caisse qui se veut ergonomique, sécurisée et qui, fort de son succès, a gagné des parts de marché sur sa concurrente, la non moins célèbre comporte Stamp. En 2019, Thomas Berger l’a faite produire sans colorant et de couleur plus claire, absorbant moins la chaleur.