La pépinière viticole face au dérèglement climatique », tel était le thème du 19ème congrès de la fédération française de la pépinière viticole qui s’est tenu à Chamonix (Haute-savoie) du 19 au 21 octobre derniers. Cette année, d’après les chiffres dévoilés par FranceAgrimer lors du congrès, 235 millions de plants ont été mis en œuvre, soit une augmentation de 15 % par rapport à l’an passé. Toutefois les aléas climatiques ont fortement impacté cette production. Le 5 juin, 15 à 20 millions de plants savoyards se sont retrouvés sous l’assaut des grêlons. Et 4 millions d’entre eux n’en n’ont pas réchappé. La grêle a aussi impacté un pépiniériste dans les Landes et trois dans le Val de Loire. A cela s’ajoute l’impact de la canicule qui a affecté considérablement les taux de reprises en pépinière. Il pourrait donc manquer des plants en 2023 si la demande est forte.
Les aléas climatiques ont également affecté la production de bois pour les greffages de 2023. La grêle a en effet détruit 80 à 100 ha de vignes-mères de porte-greffes et de greffons. Et la sécheresse a affecté le rendement dans les vignes-mères de porte-greffes. Ainsi dans le Vaucluse où sont produits 60 % des porte-greffes la production de boutures s’annonce 30 % inférieure. Des tensions sur la disponibilité en plants pour 2024 sont donc à craindre.
« Ces phénomènes climatiques sont de plus en plus fréquents, et n’épargnent aucune région. Trouver des réponses adaptées aux spécificités de notre métier conditionne l’avenir de nos entreprises », a insisté David Amblevert, le président de la FFPV le 21 octobre lors de son discours d’AG.
Pierre-Denis Tourette a dans son rapport moral rapporté des chiffres publiés début 2022 par un groupe d’assureurs (Covea) « les épisodes violents (de grêle) devraient augmenter de 40 % d’ici à 2050 avec une sinistralité moyenne qui augmentera de 20 %. Elle touchera majoritairement la façade atlantique et un grand quart sud-est. Inondation, sécheresse et grêle devraient « contribuer à une augmentation de la sinistralité de +60 % dans les années à venir ». D’où l’urgence à trouver des solutions.
La réponse passe d’abord par le déploiement d’équipements de protection et l’adaptation des itinéraires culturaux. Mais pour ce qui concerne la protection vis-à-vis de la grêle, la pépinière se heurte à une difficulté technique : elle ne peut envisager d’installer des structures fixes et rigides sous peine de coûts exorbitants car elle doit faire des rotations de quatre ans. Sans compter qu’il n’existe pas à ce jour sur le marché de filets de protection adaptés à la pépinière. « Ce sujet doit mobiliser notre commission technique et nos partenaires de la R&D », a lancé David Amblevert. Pour ce qui est des autres équipements existants, la FFPV les a recensés et elle demande à ce qu’ils puissent bénéficier d’aides de L’Etat dans le cadre de France 2030 en compléments des aides des Régions. Autre enjeu : l’eau. Sur ce point David Amblevert a appelé au « développement de techniques plus économes en eau » et au « dialogue avec les acteurs locaux impliqués ».
Mais la résilience des entreprises passe aussi par des outils financiers. Les pépiniéristes à l’instar des vignerons peuvent ainsi bénéficier du dispositif d’épargne de précaution. « Ce mécanisme permet de défiscaliser 150 000 € / entreprise en 4 ans. Malheureusement, cette somme de 150 000 € est totalement insuffisante pour relancer une pépinière (le coût de mise en culture d’un hectare de pépinière étant de l’ordre de 200 000 €, ndlr), il nous faut continuer à mobiliser nos parlementaires syndicaux pour que ce plafond soit rendu proportionnel à notre chiffre d’affaires », a-t-il expliqué. Autre outil : l’assurance. La pépinière est incluse dans le nouveau dispositif d’assurance climatique de la ferme France qui rentrera en vigueur au 1er janvier 2023. C’est officiel. Mais pour qu’elle puisse en bénéficier, il lui faut trouver une compagnie d’assurance qui veuille bien proposer une assurance climatique aux pépiniéristes. Des discussions sont actuellement en cours.