Terreur Graphique : Mon premier rapport au vin c’est mon père, qui buvait une vraie piquette. Le Tigron trois étoiles, avec un lion sur l’étiquette et un bouchon en plastique. Ce souvenir m’a marqué. En termes de consommation de vin, je préfère me souvenir des dernières bouteilles que j’ai bues, qui sont bien meilleures.
Dans votre approche du vin, vous semblez plus festif (type Singe en hiver d’Antoine Blondin) qu’hygiéniste (en mode Loi Évin). Lorsque vous évoquez la consommation avec modération, c’est à cause d’une phlébite…
Mon approche du vin est festive, mais dans le projet À boire ou je tue le chien, je montre que l’alcool n’a pas que de bons côtés. C’est pour ça que je parle de ma famille et des excès d’alcool de mon père. Il était un alcoolique, c’est une vraie maladie. La loi Évin est importante : elle était nécessaire, et tout ce qui freine un peut le capitalisme n’est pas pour me déplaire. Il y avait des publicités pour le tabac et l’alcool partout. Dans les journaux de BD comme Charlie Mensuel, la quatrième de couverture était souvent une pub pour des clopes.
J’ai fait l’expérience de ne pas boire du tout, par volonté personnelle et pas à cause d’une phlébite, c’était socialement très éprouvant. Surtout pour noël et le premier de l’an… D’autant plus que l’on se construit des habitudes et des amis en fonction de ses usages : j’ai beaucoup d’amis dans le vin (vignerons, cavistes…). Dans ma génération de quadras et de quinquas, il est difficile de ne pas boire en société. Il semble que ça change chez les jeunes, qui consomment moins de vin : mes enfants sont encore trop petits pour que je sache ce qu’il en est.
Une histoire d’ À BOIRE OU J’TUE LE CHIEN ! (@exemplaire_ed pour la précommande du livre ou lien en bio) merci à Stéphane Rosse pour son chien 😉 #aboireoujtuelechien #terreurgraphique pic.twitter.com/3TA7y17uKu
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Aujourd’hui, quelle est votre vision du vin : esthétique, bacchique, pantagruélique… ?
Ma vision est plus festive et plus qualitative. Il faut un peu de budget pour boire du vin ! Là où j’ai changé mon approche, c’est que je bois plus de vin nature. Parce que cela correspond plus à mes convictions politiques, écologiques et gustatives.
Comme il n’existe pas de réglementation officielle, comment définiriez-vous un vin nature ?
Pour moi c’est très simple : on parle de base d’une certification bio et ensuite de la façon dont le vin est vinifié. Il existe maintenant un label, Méthode Nature : la démarche est là. Ce qui compte ce n’est pas le zéro sulfite, mais que le raisin soit bon et que le vin se tienne. Je vois aussi de très bons vins qui ne sont pas nature. Mais la bonne direction est là pour moi, comme pour l’alimentation avec la bio.
Grand négociant de la Vallée-du-Rhône, Michel Chapoutier estime que l’état naturel du vin est le vinaigre…
Je connais cette critique. Cela a été le cas, et l’est encore pour certains. Mais non, les vins nature ne sont pas à défaut. J’ai bu hier une syrah du domaine Gramenon (Drôme provençale), il n’y avait pas un défaut, que du fruit.
Profondément humoristiques, vos dessins sont parfois caustiques : dans "les 5 crimes contre le vin" (voir ci-dessous), vous mettez sur même pied le kalimotxo, cocktail basque de vin et soda, et les vins Bordeaux, présentés comme un cocktail mortel de phytos : n’est-ce pas trop caricatural ?
C’est aussi le truc du livre, il ne faut pas que je raconte seulement des trucs d’alcooliques et de black-out ! Le tacle sur Bordeaux, on le fait tout le temps. Et on en boit aussi ! Il y a de très bons vignerons nature, ça change des grands domaines. Mettre Bordeaux dans cette liste est une provocation.
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Au-delà des classiques accords mets et vins, que pensez-vous des conseils vins et musique, vous qui partagez-vous goûts éclectiques sur votre compte Instagram ?
C’est très subjectif… J’ai déjà animé des dégustations de vin avec de la musique à Angers (je vais le refaire en novembre), on peut prendre toutes les caractéristiques d’un vin et accorder une musique. Par exemple un vin doux avec du jazz à papa ou un vin nature avec du free jazz. Ce qui est ludique, c’est d’amener à rencontrer le vigneron.
Pensez-vous que vos dessins et animations permettent de rendre le vin plus accessible à ceux qui peuvent le trouver trop complexe ?
Est-ce qu’il faut le faire ? Je ne sais pas… Il faut goûter et tomber sur le bon vin. C’est parce que je ne le trouvais pas que j’ai longtemps bu de la bière. Ma démarche est liée au vin, mais plus globalement à l’alcool. À boire ou je tue le chien n’est pas un album pédagogique. La bonne BD sur le vin et la bande-dessinée c’est les Ignorants d’Étienne Davodeau. Mais quand ses lecteurs découvrent le prix des vins de Richard Leroy, ça les calme !
En tant qu’influenceur, quel vin et quel caviste conseillez-vous ?
Il n’y en a plus actuellement, mais quand il y aura il faut se procurer l’appel du large du domaine des Gauchers de Cédric Fleury (Vendômois). À Tours, où j’habite, je conseille la cave du Théâtre qui a une très bonne sélection.
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