la question « accepteriez-vous ces quelques herbes dans vos rangs de vigne ? », la réponse des viticulteurs présents ce 26 juillet sur la plateforme d’essais Alt’glypho de désherbage de Mombrier, (33) en rive droite, est amère, et un brin résignée : « oui, c’est une année facile », « le zéro herbe, de toute façon il faut l’oublier », « c’est acceptable », etc. Tous regardent dubitativement le résultat « pas très net, moyennement propre », d’un rang désherbé d’abord au Sorcier (pyraflufène ; appliqué à 0,8 l/ha) et à l’Agil (propaquizafol, 1,2 l/ha) le 4 avril, puis au Katana (0,2 kg/ha) le 28 avril et enfin d’un Beloukha (acide pelargonique, 16l/ha) le 20 mai. Nous sommes en fin de campagne plutôt « sèche » et peu problématique pour l’enherbement, dans une vigne de 2 mètres désherbée par le passé.
Pas moins de 14 modalités ont été testées. L’Institut Français de la Vigne et du Vin (IFV) avec les Chambres d'Agriculture (CA) ont procédé à des notations d’efficacité tout au long de la campagne. Vu le contexte économique difficile à Bordeaux, le projet délivre aussi les coûts associés. Principales leçons lors de cette journée animée par le Vinopôle : il n’est pas possible d’obtenir du zéro herbe en fin de campagne, le glyphosate montre ses limites, le produit de biocontrôle Beloukha peine à convaincre et il va falloir élever son seuil de tolérance aux herbes.
Parmi les meilleurs résultats, 3 modalités des 14 initiées montrent à la fois une efficacité correcte et à un coût raisonnable. Premièrement, l’itinéraire glyphosate (450 g/ha) et sorcier (0,8 l/ha) appliqués le 28 avril suivis d’un Belhouka le 20 mai (16 l/ha) donne « une belle efficacité, commente Alexandre Davy (IFV), bien meilleure qu’avec le même programme, mais retardé respectivement au 20 mai et 17 juin. Nous avons fait cette dernière dans l’hypothèse où l'on n’aurait qu’une seule cartouche pour le glyphosate, mais c’est une bêtise. Il ne faut pas le faire ». Dans les deux cas, le coût n’est pas neutre, à plus de 300 €/ha (coût intrants + main d’œuvre + GNR).
Les deux autres modalités « gagnantes » ont une particularité : le glyphosate n’a été appliqué que sur une bande de 15 cm de large de chaque côté de la ligne de souches. Il y est donc plus concentré. D’abord le 4 avril à 225 g/ha avec du Katana (0,2 kg/ha), puis le 20 mai à la même dose (225 g/ha) mais cette fois avec du Sorcier (0,8 l/ha). Dans une variante, du Belhouka (16 l/ha) a été ajouté à l’ITK le 17 juin. Dans les deux cas, l’IFV note de bonnes efficacités. La différence est que le dernier coûte plus cher ! Plus de 200 €/ha, contre 94 €/ha sans Belhouka. Cette « mini bande » de 15 cm de part et d’autre sur le rang n’est valable que dans la situation où on travaille l’interligne jusqu’à lécher les souches, préviennent les conseillers.
Le pire itinéraire testé revient à l’utilisation de 100 % de Belhouka, appliqué en 5 fois à raison de 16 l/ha chaque fois. L’efficacité est jugée très mauvaise tandis que le coût explose à près de 1400 €/ha. « Cette modalité fait partie de la raison d’être du projet et de cette 4ème saison d’expé, justifie Alexandre Davy. Nous avons testé le Belhouka sur 13 des 14 ITK. Il s’est montré intéressant derrière le glypho. Par exemple sur la modalité n°4 (glypho 450 g/ha et Katana 0,2 kg/ha le 04 avril ; Beloukha 16 l/ha les 20 mai et 17 juin). Le résultat n’est pas trop mal mais le coût est important (plus de 600 €/ha). Ce programme laisse un faible enherbement que les viticulteurs qui désherbent devront peut-être considérer comme "standard" et accepter, vu la baisse de la pharmacopée ».
Les techniciens précisent qu’ils n’ont pas testé le Pledge (Flumioxazine), car « promis à l’interdiction depuis 10 ans ». Idem pour le glyphosate depuis 5 ans, d’où cette 4ème et dernière année de plateforme « Alt’glypho ». Mais la molécule reste autorisée, efficace, économique et largement encore utilisée. « Un autre objectif de ces essais était donc de vérifier comment être performant avec 450 g/ha, avec quelle association de produits, à quelles dates, etc. », explique Alexandre Davy. « Par exemple la modalité d’une seule application de glypho à 450 g. en mélange à du Katana (0,2 kg/ha) tardivement le 3 mai, a eu un résultat lui aussi très mauvais. Ce n’est pas cher, mais ce n’est pas bon ».