Vie des sols
Un bureau d'étude conclut que le cuivre n’est toxique qu’à partir de 40 kg/ha/an

Novasol experts a passé en revue toute la littérature scientifique liée au cuivre. Il conclut que la molécule ne nuit à la biodiversité des sols qu’à partir de 40 kg/ha/an, 10 fois la dose réglementaire, au bout de 3 ans, avec un impact variable selon les espèces. Il pointe aussi le manque d'essais sur site.
« Il est impossible de conclure objectivement à un quelconque impact du cuivre sur la vie des sols pour une dose de 4 kg de cuivre /ha/an » assure Battle Karimi, directrice scientifique de Novasol experts.
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A la demande d’une vingtaine de domaines viticoles* soucieux de connaître leur impact environnemental et inquiets de voir l’utilisation du cuivre interdite par la Commission européenne en 2025, ce bureau d’étude dijonnais, spécialisé dans la qualité des sols, a passé en revue toute la littérature scientifique liée à la question du cuivre.
Sa synthèse a été validée par l’Inrae. Elle porte sur 19 essais récents, dont 4 concernent exclusivement la viticulture. « Les autres articles font état des conséquences du cuivre en grandes cultures, vergers, prairies, et jachères. 14 répondent à la question de l’effet dose sur la biodiversité des sols, 4 à celle de l’effet teneur en cuivre accumulé dans le sol sur la biodiversité, et 1 traite les deux questions » décrit Battle Karimi.
Les chercheurs ont mis en œuvre des doses allant de 2,8 à 20 000 kg/ha, en appliquant souvent le cuivre en une seule fois. « Ils ont mesuré les conséquences d’une exposition aigüe, alors que les viticulteurs exposent les sols de manière chronique, en utilisant de petites doses échelonnées sur l’ensemble de la saison. Une exposition chronique offre une plus de chances aux microorganismes de s’adapter » précise la directrice scientifique.
Cette dose unique n’a impacté la qualité biologique des sols qu’à partir de 200 kg/ha, « soit 50 fois la dose limite fixée par l’Europe en 2019 » rappelle Battle Karimi.
A cette dose, les populations de vers de terre ont chuté de 15%. A 400 kg, le cuivre a impacté la respiration des microorganismes et divisé par deux les capacités de reproduction des collemboles. « En revanche, les nématodes semblent très bien résister au cuivre, jusqu’à au moins 3200 kg/ha/an » indique Battle Karimi.
Cette revue de littérature a mis en évidence un manque de données sur certains organismes, tels que les arthropodes, et la rareté des expérimentations in situ, pourtant indispensables pour mesurer le risque réel. « A ce titre, l’étude menée par O. Klein (2003-2013) est la plus pertinente mais elle nécessite d’être reproduite sur d’autres types de sol et en contexte viticole. Les données disponibles suggèrent un risque pour la biodiversité du sol, avec un impact sur les vers de terre à partir de 40 kgCu/ha après 3 ans d’application (soient après 120 kg/ha) ».
*Domaine de Villaine, Champagne Fleury, Domaine de la Romanée Conti, Domaine des Comtes Lafon, Domaine Leflaive, Domaine Jean Louis Trapet, Domaine Thibault Liger BelAir, Château Palmer, Château La Lagune, Domaine Dujac, Domaine Michel Lafarge, Domaine de la Coulée de Serrant, Domaine Marquis d’Angerville, Champagne Ruppert Leroy, Château Pédesclaux, Association des Champagnes biologiques, Clos de Tart, Grands Vignobles en Méditerranée, et Château Latour.