u 11 au 13 novembre derniers, le Hall W5 du salon Prowine China (à Shanghai) reste définitivement le plus animé. En rouge et noir, avec leur slogan “Make our Way” (faisons notre chemin), 47 exposants ne cessent de faire déguster leurs 90 marques. “Bienvenue au pavillon australien” lance Andreas Clark, le président-directeur général de Wine Australia, tout sourire. Avant de poursuivre : “c’est la première année que nous sommes aussi nombreux. Ce salon est très important pour nous. Nous sommes un grand pays de marques et de producteurs différents, mais nous sommes venus tous ensemble (de 20 régions au total, NDLR). On envoie un message au monde entier. Personne ne peut nous louper”. Andreas Clark l’affirme : “venir collectivement avec la marque ombrelle “Wine Australia” est puissant. Le marché chinois est prêt, la suppression des taxes va nous aider. Et nous avons une vision à long terme”.
Les derniers chiffres officiels de Wine Australia appuient ses propos : la Chine est devenue le marché d’exportation du vin le plus important de l’Australie. Les exportations, y compris celles de Hong Kong et de Macao, ont augmenté de 55 % pour atteindre 800 millions de dollars (environ 530 millions d’€) au cours des 12 derniers mois, soit 40 % du total des exportations australiennes. Et ce n’est que le début.
Du côté des exposants, petits et grands producteurs, témoignent de cette euphorie. Paul Squires, le propriétaire du domaine Buller Wines, exporte principalement des vins fortifiés, encore peu connus en Chine : “le marché progresse très rapidement. On a commencé il y a seulement un an et chaque mois nos ventes augmentent. On a des vins à 10 $, mais on a plus de demandes sur ceux à 20 $”. À la question, quel chiffre d’affaires espérez-vous atteindre, la réponse est aussi franche que directe : “au moins 1 million de $ par an dès la deuxième année”. Et à 5 ans ? “5 millions $. Mais il faut voir si nous aurons assez de vin, si nous allons produire assez de raisin”. Même s’il précise plus sérieusement : “on ne sait jamais comment le marché peut tourner. Il est très complexe et on doit beaucoup travailler”.
Au pays des kangourous, ces chiffres n’effraient pas. Au contraire. Parmi les anciennes familles, les fils ne se présentent pas comme la tantième génération de vignerons, mais tel Philippe Jeffries du domaine d’Arenberg, comme la quatrième génération de... businessmen. Il positionne clairement ses vins sur le segment premium. “Je viens ici depuis 3 ans. Et maintenant, je me concentre sur les vins à 75 $, comme avec notre cuvée icône “Shiraz”". Mike et Véronique Peterking du domaine Las Vino à Margaret River sont des habitués de la Chine. Ils savent qu’ici tout change très vite. Mais ils sont très optimistes. “Nos vins sont très chers. En Australie, ils se vendent autour de 90 $”. Et c’est à ce prix qu’ils continuent de pénétrer le marché chinois.
Pour accompagner ce positionnement premium, les Australiens se donnent les moyens et prouvent leur savoir faire marketing en invitant à leur “China Awards”, 400 VIP. L’objectif : récompenser les meilleurs importateurs, distributeurs, sommeliers, éducateurs et médias, tous Chinois qui ont "apporté une contribution remarquable à la promotion et à la sensibilisation du vin australien dans le pays" selon Andréas Clark. Au très prestigieux Bulgari Hotel de Shanghai. Les discours officiels sont tournés vers les valeurs chinoises : histoire, famille, liens...Les discours sont parfaitement calibrés. Les “awards” sont remis, notamment aux leaders d'opinion les plus influents du moment. Et bien sûr, avec un service impeccable (encore rare en Chine), les vins australiens s'enchaînent dans les verres.


Mais qui finance cette grosse machine marketing ? Le gouvernement australien, entre autres. Il a investi 50 millions de dollars pour soutenir les exportations sur les marchés étrangers, notamment en Chine. C’est grâce à cette enveloppe, comme le dit Andréas Clark "que nous avons pu nous rendre si nombreux au salon à Prowine Shanghai et donner aux producteurs, la possibilité de renforcer leurs relations avec les clients existants ou de nouer des relations avec des partenaires potentiels en face-à-face”. Heureusement, comme le dit en plaisantant Mike Peterking que “la Chine est assez grande pour les vins australiens et français” !