L’intérêt de la prospective est de sortir de l’urgence du quotidien, en permettant une prise de décision qui intègre le long terme » pose Boris Calmette, le président de la Confédération des Coopératives Vinicoles de France (CCVF), lors de son Congrès bordelais. Prenant de la hauteur, le viticulteur languedocien a défendu les pistes ouvertes par la Prospective Coopération Vinicole réalisée par les équipes spécialisées de FranceAgriMer, parties de 458 hypothèses pour arriver à quatre scénarios. La méthode ne faisant pas appel aux probabilités, mais à une réflexion sur des futurs possibles, ou du moins crédibles. L’étude imaginant dans chaque environnement, plus ou moins favorables au modèle coopératif, les adaptations et réactions possibles, ou non, de la coopération.
Le premier scénario imagine « les coopératives vinicoles sans attraits ». Dans une filière devenue agro-industrielle au sein d’un cadre économique libéral, « les coopératives, handicapées par leur statut et la lourdeur du processus de décision n’ont pas la réactivité suffisante pour innover significativement » estime le rapport. Le vin étant dominé par le négoce, les coopératives sont limitées au rôle de fournisseurs de matière première, survivant au mieux avec une rente AOC.
L’option « nouveau modèle coopératif pour temps de crise » est déjà plus optimiste, reposant sur une évolution du statut coopératif. L’adaptation passant par un changement sociétal fort : la « remise en cause radicale de la domination du critère économique de maximisation du profit à court terme, au bénéfice du principe d’efficience socio-économique ». Ce succès a cependant un coût philosophique, avec une évolution des statuts pour tisser des partenariats hors de la région d’origine, voire à l’étranger.
La prospective « la coopérative, un outil industriel performant de regroupement de l’offre » s’inscrit dans un cadre politique prônant moins d’alcool et de pesticides. Ce qui conduit à l’industrialisation de la production, pour fournir un produit uniformisé. Les unions se développent, mais rompent avec leurs origines. « Les coopératives qui demeurent sous statut trouvent leur planche de salut dans le regroupement de l’offre à l’échelle européenne via des unions multiterritoriales » avance l’étude.
Le dernier scénario « la coopération vinicole rayonnante », est le seul scénario où il n’y a pas de récession économique généralisée. Ce qui permet d’imaginer un contexte favorable aux AOC et à la valeur ajoutée territoriale, piliers de la coopération. « La gouvernance coopérative est un atout qui permet l’achat d’entreprises pour créer des filiales » explique le rapport. Qui dresse un avenir des plus séduisants à la coopération, jusqu’à imaginer que « ce modèle est enseigné, et ses vertus attirent les talents dans les conseils d’administration et parmi les cadres salariés ».


Une fois ces prospectives assimilées, l’enjeu est désormais d’en tirer une stratégie concrète. « C’est-à -dire des réponses possibles et souhaitables » explique Boris Calmette, pour qui « l’exercice prospectif doit nous permettre de mieux anticiper les changements possibles pour s’y préparer et en tirer parti ». L’élu propose deux pistes de travail : diffuser les résultats de l’étude dans les différents bassins. D’abord des présentations dans les diverses fédérations. Puis « dans un second temps nous devrons travailler aux actions concrètes à mettre en place à court et moyen terme pour décliner ces orientations stratégiques » conclut-il.