obrement intitulée Analyse des filières vitivinicoles des principaux pays producteurs dans le monde, l’étude menée pendant deux ans par trois cabinets*, pour le Comité National des Interprofessions des Vins (CNIV) et FranceAgriMer, ne manque pas d’ambition. Et de densité (cliquer ici pour en lire la dizaine de rapports). Présentée ce premier décembre à des représentants de la filière, l'étude se donne pour objectif de « comprendre les raisons du succès des filières les plus performantes » en se focalisant sur la comparaison des facteurs de réussite des dix premiers pays producteurs de vin dans le monde**.
Par rapport à ses illustres compétiteurs, la France sort notamment du lot pour son hégémonie sur le haut de gamme. Mais pour les analystes, elle se distingue surtout par la diversité de son offre (couvrant tous les prix et couleurs, même si elle est peu exploitée), ou la disponibilité de l’eau pour la filière viticole (dans la perspective du changement climatique). En terme de faiblesses stratégiques, l’étude souligne qu’elles ne se limitent pas au seul niveau, élevé, des coûts de production (la France se trouvant d'ailleurs au niveau des vignobles argentins ou italiens, alors que « les Etats-Unis et la Nouvelle-Zélande ont les coûts les moins compétitifs, notamment du fait du niveau élevé du prix du raisin »).
En terme de compétitivité, les vins français sont non seulement plombés par « des coûts de production élevés, une réglementation contraignante et une certaine atomisation de la filière », mais surtout par la faible « adaptation de son offre aux attentes des marchés » estime l’étude. Pour analyser ce défaut, le rapport se penche sur le meilleur élève de la classe : la Nouvelle-Zélande. L’archipel se place en bonne position sur ce critère de par « sa stratégie de niche et son offre réduite en vins blancs haut de gamme ». Et surtout son orientation à l’export suivant le marketing de la demande (à l’instar de l’Australie et des Etats-Unis).
Face à ce modèle, la large gamme française repose sur un « modèle push, centré sur la production. Un marketing de l’offre, dépendant de la mise en avant et de la force de quelques origines et marques » estime le rapport. Cette stratégie ascendante a permis à la filière de se positionner en référence, notamment sur les vins premiums, mais montre ses limites face à une concurrence exacerbée à l'export.


« La France dispose d’un avantage compétitif en termes de diversité de l’offre, mais ne parvient pas à proposer les bonnes combinaisons par marché, pour bénéficier de la croissance mondiale » résume sans fard l’étude. Ne s’arrêtant pas qu’à ces constats, ce rapport préconise notamment deux pistes stratégiques.
L’un de bon sens, en délaissant « une stratégie actuelle d’écoulement de la production » pour « favoriser la réappropriation par la filière de la connaissance intime des marchés. Et de la création de valeur, générée par les marques, aujourd’hui transférées à d’autres opérateurs que ceux de la filière (GMS, importateurs,…) ».
En regard de ce défi, l’autre voie semble presque plus aisée : « élargir le portefeuille de marques de notoriété internationale vers les vins tranquilles et développer le segment d’entrée de gamme. Ce qui ne peut être atteint sans un assouplissement des réglementations et la révision des pratiques culturales. »
* : Il s'agit des cabinets Agrex consulting, Efeso Consulting et Sève Conseil.
** : Pesant pour les trois quarts de la production mondiale, il s’agit de l’Afrique du Sud, de l’Argentine, de l’Australie, du Chili, de la Chine, de l’Espagne, des Etats-Unis, de la France, de l’Italie et de la Nouvelle-Zélande.