our peu que les spores de Guignardia bidwelli rencontrent des organes verts de la vigne, les dégâts ne tardent pas* sur les feuilles (tâches en coups de fusil) ou sur les grappes (sensibles de la nouaison à la véraison). En 2015, le vignoble méditerranéen a subi une forte pression de black-rot, entraînant des pertes de récolte et la stupéfaction des opérateurs bio, n’ayant pas de produits agréés dans la lutte contre le black-rot.
« Le dernier millésime où l’on avait eu une aussi forte pression remonte à 1997 » rapporte Nicolas Constant (Sudvinbio). Cette pression cryptogamique a été particulièrement virulente, portée par des conditions climatiques favorables : fraîches et humides. Sachant que peu de précipitations suffisent à la propagation de ces spores. « Les périthèces se dispersent après de faibles pluies, dès 0,3 millimètres (pour les pycnides, le seuil est à 3 mm). Les pluies contaminatrices ont été très précoces en avril 2015 » explique Nicolas Constant (voir encadré).
L’inoculum du black rot pouvant résister des années, la chasse aux réservoirs à spores doit être menée dans les vignobles touchés pour prévenir de futures contaminations. « Il faut sortir et brûler les bois de taille, ce qui est coûteux. A minima il faut les enfouir » conseille Nicolas Constant, qui souligne que les fils des vignes palissés conservent les vrilles. Pour mettre en place ces mesures prophylactiques, encore faut-il bien pronostiquer la présence de black-rot en saison, ses symptômes pouvant être confondus avec du rot brun ou du mildiou, voire le botrytis.
Mais, la palette d’actions du vigneron bio ne se limite pas à des mesures prophylactiques l’hiver suivant. Des traitements sont ainsi envisageables, même si aucune préparation n'est homologuée contre le black-rot. D’après les résultats de quatre ans d’expérimentations menées en Beaujolais, «on obtient de bons résultats avec l’association de cuivre métal et de soufre mouillable » résume Caroline Le Roux (Chambre d’Agriculture du Rhône) qui préconise par passage de « privilégier des doses de 8 kg/ha de soufre en spécialité commerciale et d'opter pour une dose seuil de 300 g/ha de cuivre (à moduler selon le feuillage). »
« Cela va changer les modalités de traitements. On retardait leur début pour le mildiou, il faudra les avancer pour se caler sur le risque black rot » prévient Eric l’Helgouach (Chambre d’Agriculture du Vaucluse). Avec 4 à 7 traitements supplémentaires sur la campagne, il estime le surcoût entre 300 et 370 euros/hectare (intégrant les produits et la main d’oeuvre).


Semblant prometteuses, ces adaptations de la campagne de traitement au risque de black rot restent encore à affiner. Des pistes sont encore à explorer, ne serait-ce que pour mieux saisir l’impact des contaminations primaires (de la feuille) sur celles secondaires (des baies) ou déterminer si le vinaigre est un traitement alternatif (de la bibliographie faisant état d’effets curatifs de l’acide acétique). Et si l'inoculum peut rester présent des années sur une parcelle, son expression ne dépend que du climat et appelle à la vigilance. « Une forte contamination en 2015 n’induit pas forcément une forte attaque l’année suivante. Les conditions printanières seront déterminantes » conclut Nicolas Constant.
* : Dégâts d’autant plus importants que les cépages sont sensibles (tels que le caladoc, gewurztraminer, grenache, marselan…).
D’après les premiers résultats d’un enquête de SudVinBio, 75 % des domaines bio ont repéré des symptômes de black-rot l’an dernier. 53 % estiment avoir perdu de la vendange en conséquence. Globalement, la perte de récolte s’élèverait globalement à 26 %.