yant requalifié le vieillissement commercial des eaux-de-vie en activité de transformation industrielle, le Ministère des Finances a imposé aux négociants de Cognac une hausse de 50 % de leurs taxes et cotisations foncières. Une mesure salée, qui se chiffre, à l'heure du contrôle fiscal, en centaines de milliers d’euros de redressement pour les grandes maisons.
Les négociants contestent logiquement cette vision manufacturière des chais de vieillissement en général, et des tonneaux en particulier. « Nous restons convaincus que les barriques sont des installations de vieillissement et pas des outils industriels » tranche Patrice Pinet, le président du Syndicat des Maisons de Cognac (SMC) et directeur général de la maison Courvoisier (groupe Beam Suntory).
Ayant porté le dossier devant le Tribunal Administratif de Poitiers, la maison Courvoisier a été déboutée en janvier 2015. Premier opérateur de Cognac, la société Hennessy a également saisi le juge administratif, comme le rapporte le quotidien Sud-Ouest. La filiale du groupe LVMH ne souhaite pas commenter l’affaire durant son instruction, mais précise s’être acquittée, au préalable, de l'intégralité des sommes réclamées par l'Etat.
Le SMC n’a quant à lui pas arrêté de position commune sur le dossier, la diversité des situations n’y aidant pas. Si Courvoisier possède un outil mélangeant ses activités (sont imbriqués vieillissement, assemblage, conditionnement…), Hennessy a ainsi des bâtiments les séparant bien (vieillissement sur le site de Haut-Bagnolet, assemblage au Haut-Bagnolet…). Attendue pour la mi-octobre, l’appréciation du magistrat de Poitiers sur la requête de Hennessy pourrait faire bouger les lignes.
Si la taxe ne concerne aujourd’hui que les négociants, les viticulteurs et bouilleurs de cru semblent prêts à se positionner en soutien, craignant de pouvoir être prochainement concernés par de pareilles initiatives fiscales. Président du Bureau National Interprofessionnel de Cognac, Jean-Bernard de Larquier confie que des réflexions sont en cours au sein de l’interprofession. « Il n’y a pas de position arrêtée aujourd’hui, si ce n’est que définir un chai de vieillissement comme un outil industriel, c’est un peu fort de chocolat » estime-t-il.
« C’est dommage, si l’on revient à l’idée d’origine de la taxe, elle devait favoriser les activités industrielles sur celles commerciales. Mais avec l’augmentation du coût de construction du bâti, ce sont au contraire ceux qui investissent qui sont sanctionnés » regrette Patrice Pinet.
[Photo : Chais de vieillissement de Cognac]