onviée par l’Association Nationale des Elus du Vin (ANEV) à débattre avec les députés sur les enjeux de santé publique, la filière viticole a répondu présent ce 17 février, dans les locaux de l’Assemblée nationale. Au menu, la future loi de santé publique, qui sera présentée au Parlement au printemps prochain et attise les inquiétudes du monde du vin. En ligne de mire, l’Anpaa, absente des débats du jour mais omniprésente dans les esprits. Les amendements déposés par l’association de lutte contre l’alcoolisme pour durcir une loi qui ne présentait aucune mesure contre le vin passent mal.
« Quelle vision du vin voulez-vous ? a demandé Bernard Farges, président de la CNAOC (Confédération Nationale des producteurs de vins et eaux de vie de vin à Appellations d'Origine Contrôlées), en s’adressant à distance au président de la République. Celle de l’Anpaa, dont son président nous a dit, les yeux dans les yeux, que l’année 1943 était une grande année de lutte contre l’alcoolisme car le vin était alors réquisitionné pour l’armée allemande ? Ou celle de la responsabilité ? Monsieur le président, le monde du vin doit parler aux français de consommation responsable. Osez nous laisser travailler. Osez tourner le dos à une politique d’interdiction. Qui sait boire, sait vivre, dit l’Espagne, notre concurrente. Monsieur le président, osez nous faire confiance. »
Les parlementaires présents (une quarantaine d’inscrits) avaient à cœur de rassurer l’assistance. « La ministre de la Santé nous a assuré, à l’occasion d’un dîner sur la loi de santé publique, qu’aucune mesure antivin ne serait prise », a insisté Catherine Quéré, présidente du groupe d’études viticultures de l’Assemblée Nationale et députée de Chartente-Maritime. Une affirmation confirmée par Fabrice Verdier, député du Gard, selon qui « il n’y a pas de volonté de la part de cette majorité de durcir la loi » sur les questions viticoles.
Pour autant, le monde du vin n’est pas serein. La loi Evin, soumise à l’interprétation des juges, est dans tous les esprits. « Cette loi laisse trop de de zones d’ombre, a martelé Anne Gautheron, avocate spécialisée en droit de la communication. A propos de la publicité pour le vin, tout est subjectif et il revient aux juges de définir ce qui relève de la publicité ou non. » La filière a alors exhorté les parlementaires à « reprendre le pouvoir », selon les termes de Jérôme Agostini, et à rendre moins flou un texte qui leur lie les mains.
Mais remettre en question la loi Evin ne semble pas envisageable pour le moment. Pascale Got, députée de Gironde, propose de « replacer le texte dans un contexte plus moderne » pour l’adapter aux nouveaux modes de communication. « La discussion de la loi a été repoussée de quelques semaines, a précisé Gérard César, président du groupe d’études vigne et vin au Sénat. Cela nous laisse du temps. Mais à nos opposants aussi. » Les parlementaires se sont engagés à rester vigilants et à éviter tout durcissement du texte. La filière, elle aussi, veille.
[Photo : Premières Rencontres de la Vigne et du Vin ; Emilie-Anne Jodier]