aisant suite à la réforme des missions et de l'organisation de l'Institut National de l'Origine et de la Qualité (INAO), la récente augmentation de 3 centimes des droits sur les vins exaspérait*. Prise dans le cadre de la réorganisation des unités territoriales de l'Institut National de l'Origine et de la Qualité (INAO), la décision de fermer le bureau de Sancerre a achevé de convaincre les professionnels du Centre Loire qu'une autre voie pouvait être envisagée. Rejetant la réduction apparente des services de proximité et l'augmentation avérée de leurs coûts, ils évoquent ouvertement la possibilité d'une sortie du système d'appellation, dans lequel les vins de Sancerre s'inscrivent depuis son origine, en 1936. Face à ce qui peut être présenter comme une menace, voire un chantage, le vigneron Gilles Guillerault (caves du Prieuré, Crézancy-en-Sancerre) met les choses au clair.
Pour le président de la Fédération des Unions Viticoles du Centre, « il ne s'agit pas de marchandage, nous sommes de grands garçons et nous faisons ce que nous disons depuis longtemps. Nous avons pris acte du chemin pris par les orientations de l'INAO, le notre sera peut-être différent. » Parmi les pistes à expertiser, la création d'une marque privée fait particulièrement parler d'elle. Gilles Guillerault précise cependant « ne pas être un spécialiste du droit. Je ne donne pas de réponse en même temps que les questions : tout est à faire ! La réflexion est entamée pour déterminer s'il existe d'autres solutions, qui soient possibles juridiquement et meilleures que la situation actuelle en terme de coûts, de contrôle et de flexibilité. ».
« Je serais eux, je ferais attention » nous confiait récemment un représentant de l'INAO. Reconnaissant l'enjeu de la continuité territoriale suite à la fermeture du bureau de Sancerre (rapatrié à Tours), il ne voyait pas comment l'AOP Sancerre, inscrite à Bruxelles, pouvait techniquement devenir une marque privée. Le problème ne se pose pas ainsi pour Benoît Roumet (directeur du Bureau Interprofessionnel des Vins du Centre). Pour lui, « la bonne question est de savoir à qui appartiennent les AOC. Au-delà des détails techniques, la boîte de Pandore a été ouverte. Le système existe depuis 1936, il est toujours nécessaire de se remettre en question, pour répondre aux demandes des professionnels et des consommateurs ».
Si les producteurs de Sancerre (2 950 hectares pour 162 000 hectolitres de vins en 2012) vont loin dans leur réflexion, les six autres appellations du Centre Loire (Châteaumeillant, Coteaux du Giennois, Menetou-Salon, Pouilly-Fumé, Quincy et Reuilly) partagent les réserves sur l'INAO. La FUVC a ainsi décidé de bloquer sur ses comptes les fonds correspondants à l'augmentation de 30 % des droits. « Ils râlent » note Gilles Guillerault, mais pour lui ce sont « les vignerons qui font l'appellation, pas l'inverse. L'inertie de l'INAO est pesante, ce sera pire quand ça ne deviendra plus qu'un bureau d'enregistrement et de protection à l'international. »
* : le déplafonnement des droits sur les vins ayant été fixé à 50 %, Gilles Guillerault pressent « qu'à terme, dans trois ans, la hausse se fera à 5 centimes. Et quand on lit entre les lignes, on voit que les professionnels devront abonder de 40 à 50 % du budget de l'INAO, les droits devront encore augmenter : doubler, tripler... »
[Photo : Sancerrois, Caves du Prieuré]