es « obsèques de l’agriculture française », c’est la manifestation choc qu’organisent ce jeudi 18 décembre à 17 heures les Jeunes Agriculteurs de Gironde (JA33) devant la Cité du Vin à Bordeaux. Une opération qu’un communiqué pose « en contestation à la promotion des vins ukrainiens ce soir-là, en soutien aux mobilisations d’envergure à Bruxelles le même jour et sur notre territoire » contre l’accord commercial du Mercosur et la gestion de la crise sanitaire de la Dermatose Nodulaire Contagieuse (DNC). Une manifestation à l’intersection des luttes agricoles et de la crise viticole.
Faisant écho à la benne de déchets agricoles vidée pour les mêmes raisons dans la nuit du jeudi 11 au vendredi 12 décembre denier par la Coordination Rurale de Gironde (CR33), l’action des JA33 critique « la promotion des vins ukrainiens sur un territoire en crise profonde » qui témoignerait d’« un véritable mépris pour les violences subies en Gironde par les viticulteurs » face aux cours non-rémunérateurs et au plan de crise jugé sous-dimensionné avec 130 millions € pour l’arrachage définitif financé par la France et une distillation de crise en suspens à Bruxelles (30 à 40 millions € seraient envisageables, quand la filière en demande le double). « Les annonces pour la crise viticoles sont insuffisantes et relèvent surtout de "l'effet de manche" ! Les enveloppes sont largement trop faibles, et la prise de conscience à Paris ne se fait pas ! » martèle le communiqué.
Regrets institutionnels
Si la filière regrette dans son ensemble des aides limitées et retardées, certains ne partagent pas les actions syndicales ciblant la Cité du Vin. En témoigne la dernière assemblée générale du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux (CIVB), son président Bernard Farges accueillait ce lundi 15 décembre une visite impromptue de représentants de la CR 33 (venus déposer une nouvelle benne de protestations). « Je regrette que vous ayez vidé une benne devant la Cité du Vin » leur déclarait le viticulteur de l’Entre-deux-Mers, soulignant que « la Cité du Vin c'est 400 000 visiteurs par an à Bordeaux pour parler du vin. Elle a été créée dès le début, non pas comme la cité du vin de Bordeaux, parce qu'on n'aurait pas pu la créer du tout si on s'était concentré sur la seule cité du vin de Bordeaux, avec un statut juridique, fiscal, financier qui existe parce qu’on peut avoir d'autres vins dedans. Mais c'est entre 80 et 90 % du propos tenus et des vins dégustés qui sont des vins de Bordeaux. »
Confirmant qu’il y aura cette fin d’année une présentation des vins d'Ukraine (« on pourrait au moins être sympathique avec l'Ukraine en ce moment »), Bernard Farges pointe qu’en rejetant « des actions sur d'autres vins, c'est aussi refuser la promotion que l'on doit avoir sur le vin. On a besoin de communiquer sur le vin au sens large. Dont le vin de Bordeaux évidemment. Et les touristes qui viennent à Bordeaux ils sont vaccinés, si je dois dire. » L’ouverture aux vins du monde étant aussi un gage d’attractivité souligne Jean-Marie Garde, le président de la Fédération des Grands Vins de Bourgogne (FGVB), soulignant qu’« on voit bien qu'en Bourgogne, où effectivement on ne présente que des bourgognes, les cités du vin ne marchent pas très bien. Nous avons à Bordeaux cette volonté de parler du vin, plus globalement. Bordeaux a toujours été la référence, on traverse une période difficile, mais il ne faut pas oublier que Bordeaux a été pendant de nombreuses années la référence pour le vin. »
Gérée par la Fondation pour la culture et les civilisations du vin, la Cité du Vin confirme à Vitisphere que sa mission est de « défendre, valoriser, partager et transmettre le patrimoine universel et vivant du vin auprès du plus grand nombre. Le vin est présenté comme un patrimoine, une culture, que nous partageons à travers le monde et en effet, dans nos différentes activités culturelles, on s’intéresse aux vignobles du monde entier et pas uniquement à celui de Bordeaux. C’est cette dimension qui fait l’unicité de la Cité du Vin : c’est le seul musée du vin dans le monde qui ne parle pas que du vin de la région dans laquelle il est situé, mais du vin comme patrimoine mondial. »
Ce qui n’empêche pas la Cité du Vin de laisser la part du lion aux vins bordelais. « Le vignoble de Bordeaux occupe une place particulière et est largement mis en avant au sein de la Cité du Vin » indique l’établissement, listant « deux modules de l’exposition permanente entièrement dédiés à Bordeaux et son vignoble, plus de la moitié des vins dégustés sont des vins de Bordeaux, soit 25 000 bouteilles par an (au Belvédère ou dans les Ateliers), plus de 600 ateliers de dégustation sont proposés chaque année dans lesquels figure toujours au moins un vin de Bordeaux (parmi eux, l’atelier Bordeaux 360° qui parle exclusivement du terroir Bordelais plus de 250 fois par an, soit 6 200 participants) et le 1er avril, rouvrira le parcours sensorial de dégustation Via Sensoria qui sera entièrement consacrée à Bordeaux (avec 4 dégustations) » pour les 10 ans de la Cité du Vin (ouverte en 2016).




