Newsletters
Magazine
Article réservé aux abonnés 
ans les albums d’Astérix, les disputes et bagarres entre villageois aboutissent toujours à la paix retrouvée lors d’un traditionnel banquet. À Bordeaux, la vaisselle est cassée et la table brisée… La section girondine de l’Union des Métiers et des Industries de l'Hôtellerie (UMIH 33) vient de reporter l’opération "Bordeaux se Met à Table", le banquet gastronomique géant prévu ce dimanche 19 octobre au Jardin Public de Bordeaux, pour la première édition de l’évènement national Vignobles en Scène (prenant la suite du Fascinant Week-end). 200 préventes étaient déjà passées sur le site dédié, qui prévenait qu’en cas de pluie, l’évènement pouvait être reporté au printemps. L’ajournement n’a pas attendu la météo, ayant été décidé par l’UMIH 33 ce début octobre à la découverte de la première fête des Vignerons Indépendants, se tenant sur les allées Tourny du vendredi 3 au dimanche 5 octobre 2025, où étaient mis à l’honneur des food-trucks.
Reproches
« On est conscients que les Vignerons Indépendants n’ont pas pensé à mal : on ne leur reproche pas d’avoir fait leur évènement. On en veut à nos partenaires municipaux de ne pas nous entendre » pose Laurent Tournier, le vice-président de l’UMIH33, qui veut pousser un cri d’alarme « faire venir des foodtrucks en plein centre-ville sans concertation est assez cavalier et injuste. C’est de la concurrence déloyale par rapport à nos schémas économiques fragiles. Nous demandons aux politiques et organisateurs de le prendre en compte. » Le restaurateur reproche à la mairie de Bordeaux de soutenir deux évènements à 15 jours d’écart liant vin et gastronomie avec deux modalités de restauration diamétralement opposées : « la concurrence est nécessaire, mais elle doit être loyale. Nous n’avions pas été prévenu de l’évènement [des Vignerons Indépendants], nous avons pris la décision avec nos partenaire de suspendre l’évènement [du grand banquet]. On explique ce geste, que la mairie n’a pas compris. On espère qu’ils seront plus attentifs à l’avenir dans l’évènementiel qu’ils autorisent ou coorganisent. »
« Nous avons mis à disposition un lieu et du matériel, l’UMIH a décidé de reporter la manifestation » réplique Brigitte Bloch, la conseillère municipale déléguée au tourisme et l'économie du vin à la mairie de Bordeaux. « On était près et on accompagnait » poursuit la présidente de l’Office de tourisme et des congrès de Bordeaux Métropole, pour qui la présence de foodtrucks est « banale » et qui pointe que Bordeaux accueille 2 500 manifestations par an. Parmi elles, il n’y aura pas de Vignobles en Scène cet automne. « Bordeaux a déjà beaucoup d’évènements dans le vignoble (comme en témoignent l’augmentation du nombre de guinguettes cet été) » analyse Brigitte Bloch, également vice-présidente du pôle œnotourisme Atout France.
Chez les Vignerons Indépendants de Gironde, on regarde avec circonspection ce clash entre l’UMIH et la mairie en rapportant que la présence de foodtrucks était à l’initiative du syndicat des caves particulières. Et qu’il y avait surtout des stands de conserves, salaisons et autres huîtres plus que de restauration (un foodtruck servant des entrecôtes). Coorganisateur du grand banquet prévu ce week-end, le Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux (CIVB) ne souhaite pas commenter, cette décision de report étant indépendante de sa volonté.
« La filière doit se positionner en soutien des restaurateurs » estime pour sa part Michel Chapoutier, le président de la Fédération Nationale Vignobles & Découvertes, qui se déclare solidaire avec les restaurateurs : « il est important que la restauration et le vin marchent main dans la main. On les comprend et on les soutient. Ils emploient, ils paient des charges sociales… Et il faut bien comprendre qu’une licence 4 peut valoir 20 000 €. Je n’ai rien contre la mode des foodtrucks, mais cela reste une concurrence déloyale des restaurateurs. » Le vigneron en biodynamie ajoutant qu’écologiquement, toute la vaisselle est jetable pour les foodtrucks. « Il faut défendre la restauration : ce sont nos partenaires » martèle Michel Chapoutier, ne souhaitant pas rentrer dans l’éternelle polémique sur les coefficients multiplicateurs du vin (pour le marketing de l’offre des AOC imposent d’éduquer le consommateur, ce qui passe par les sommeliers devant être correctement formés et rémunérés).
