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Angélus sous administration judiciaire : le vin de James Bond divise sa famille
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Saint-Émilion
Angélus sous administration judiciaire : le vin de James Bond divise sa famille

Nouvel épisode de Dallas en Saint-Émilion au château Angélus : pour dépasser les blocages entre branches familiales d’actionnaires visiblement irréconciliables, le tribunal de commerce de Libourne vient de nommer un administrateur judiciaire provisoire afin de fluidifier les relations et tenter de les remettre en ordre de marche.
Par Alexandre Abellan Le 10 août 2025
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Angélus sous administration judiciaire : le vin de James Bond divise sa famille
Sur la cuvée du classement A d’Angélus, la famille de Boüard de Laforest était mise en avant. - crédit photo : Alexandre Abellan
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omme les diamants, les conflits familiaux sont-ils éternels ? Pour recoller les morceaux d’une famille désunie, le juge des référés du tribunal de commerce de Libourne nomme ce 6 mai maître Sylvain Hustaix comme administrateur judiciaire provisoire du château Angélus (130 hectares de vignes, dont 65 ha à Saint-Émilion et plus de titre de grand cru classé depuis 2022). Désigné pour 12 mois renouvelables, le mandataire judiciaire doit « faire se concilier les branches familiales actionnaires en vue de la mise en place d’une gouvernance pérenne » et résoudre à l’amiable les différends opposant deux groupements d’actionnaires issus de deux branches familiales copropriétaires du vin de l’agent 007 (voir encadré).

Le conflit oppose des membres des deuxièmes et troisièmes génération succédant au fondateur d’Angelus*, Maurice de Boüard, qui a eu trois fils : Jacques, Christian et Alain de Boüard. Les tensions actuelles mobilisent la branche d’Hubert de Boüard de Laforest (fils de Jacques de Boüard, promoteur du développement de la propriété et acteur du classement en premier grand cru classé A d’Angélus de 2012 à 2022) et les branches Grenié de Boüard et Kellerson (issues de Christian de Boüard). Thierry Grenié de Boüard issu de cette dernière branche, éphémère directeur général adjoint d’Angélus (2016-2019) et désormais mobilisé sur la propriété familiale du château Daugay (à Saint-Émilion, autonomisé d’Angélus en 1982 et ayant été gérée par ses parents Hélène de Boüard et Jean-Bernard Grenié). Depuis 2012, Stéphanie de Boüard-Rivoal assure la direction du château Angélus, ayant succédé à son père Hubert de Boüard (restant salarié rattachée à la direction du domaine, tout en ayant une activité d’œnologue conseil à Bordeaux et dans le monde).

Différend depuis des années

Entre les deux branches, les tensions ont conduit à l’impossibilité de nommer en assemblée générale les organes de direction le 23 février 2025 (conseil de surveillance et directoire). « Le différend opposant les deux groupements d’actionnaires perdure depuis plusieurs années sans trouver de solution malgré diverses tentatives de conciliation » rapporte le tribunal, qui a nommé un administrateur judiciaire jusqu’à ce qu’il y ait nomination d’un conseil de surveillance et de membres du directoire. Publié ce 11 juillet, les fins de présidence du directoire de Stéphanie de Boüard-Rivoal et de présidence du conseil de surveillance de Philippe Kellerson font écho à la nomination de l'administrateur provisoire.

Vivre et laisser mûrir

Contactée, la direction d’Angélus confirme que la propriété est sous administration judiciaire depuis 3 mois. Revendiquant le titre de première actionnaire via sa holding, Stéphanie de Boüard-Rivoal précise que cet appel au tribunal fait suite au blocage de la gouvernance dans le cadre d’un conflit actionnarial. L’administrateur judiciaire peut voir prendre fin sa mission dès qu’une solution au différend qui oppose les branches familiales sera trouvé, ajoute la direction, précisant que la partie opérationnelle de gestion de la propriété reste assurée par les équipes d’Angélus, dont Stéphanie de Boüard-Rivoal et Hubert de Boüard de Laforest.

Ce dernier indique à Vitisphere que « quand des positions sont difficilement conciliables, la vie et un membre extérieur permettent de résoudre la situation. L’arrivée d’un administrateur simplifie beaucoup une gestion familiale compliquée faute d’accord. Les assemblées générales sont plus sereines qu’il y a 6 mois. » Un autre membre de la famille souligne que « ce sujet nous appartient, il n’y a rien à dire de plus : il y a deux branches depuis toujours ». Ce que confirme Hubert de Boüard de Laforest : « la situation familiale n’est pas nouvelle. Depuis 40 ans que je suis dans l’entreprise, cela n’a jamais été très simple. Il y a désormais plus de fluidité » estime le président de la Jurade de Saint-Émilion.

Bons baisers de roussi

La nomination d’un administrateur judiciaire par Angélus suscite des rumeurs dans le vignoble bordelais où l’on imagine qu’il n’y a pas de fumée sans feu et où l’on se pose la question de la santé financière de l’ancien cru classé. Pour sa direction, il n’y pas de sujet, le domaine reste solide après une campagne des primeurs ayant connu un certain succès malgré la conjoncture (Angélus a investi ces dernières années dans un réseau commercial mondial). N’ayant pas arraché de vignes en dehors des restructurations habituelles, Angélus finalise les travaux lancés depuis 4 ans de son nouveau chai gravitaire (qui ne devrait pas accueillir la vendange 2025). Alors que les rumeurs de crus classés mis à la vente enflamment les spéculations, Angélus se montre rassurant et confiant dans un environnement brulant.

« Stéphanie de Boüard est une femme de tête qui tient la barre avec fermeté, rigueur et précision, sans que les résultats ne puissent totalement déplaire à la branche Grenié » analyse un propriétaire de la rive droite, pointant que « son père est un grand commercial, qui sait faire du vin, et qui soutient tout le temps sur le terrain son équipe commerciale qui lui a permis de sortir de la dépendance au négoce. Et grand bien leur en a pris » alors que les ventes en primeur patinent face aux surstocks du négoce et le manque de demande des marchés. Ce qui se traduit par la fragilisation des grands crus. « Il y a beaucoup trop de biens prestigieux à la vente et des acheteurs qui regardent les comptes et se posent des questions sur la commercialisation » analyse un connaisseur de Saint-Émilion, pointant que si de « magnifiques vendanges arrivent, les chais sont pleins et les comptes en banque sont vides ». Une crise au shaker, pas à la cuillère.

 

* : Si l’on s’en réfère aux travaux de généalogie familiale et de recherches historiques de Bruno de Boüard (fils d’Alain), qui a partagé ses conclusions en 2017 dans le blog du défunt Jacques Berthomeau.

James Bond reviendra ?

En 2024, Hubert de Boüard se souvenait d’un déjeuner à Londres en 2006 avec les familles Broccoli et Wilson produisant alors les films de la franchise James Bond (désormais pilotée par Amazon). Faisant remarquer à Barbara Broccoli l'absence de vins rouges dans la série depuis le château Lafite Rothschild 1959 dans Dangereusement vôtre (1985), Hubert de Boüard a fait émerger de fil en anguille l'idée d'une apparition du château Angelus dans un film de 007. Rédhibitoire, le prix nécessaire a un tel placement le rend financièrement impossible pour le cru alors classé. Après la visite des studios anglais de Pinewood avant le tournage de Casino Royale, Barbara Broccoli lui annonce aimer l'idée de deux familles tout simplement amies. Les vins d'Angelus seront présents à titre gracieux, en échange de leur fourniture. Les vins apparaîtront dans des trains pour Casino Royale (2006) et Spectre (2015), ainsi que dans l’appartement de Q à Londres dans Mourir peut attendre (2021).


 

 

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Tous les commentaires (1)
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Dominique Le 10 août 2025 à 11:06:22
C'est un peu comme les crocodiles dans un marigot qui s'assèche. Quand il n'est plus possible de changer la Porsche Cayenne, ça finit en AG avec du sang sur les murs.
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