arre de perdre leur récolte. Dans le Var, des vignerons ont mis sur pied leur propre équipe de chasse aux sangliers. « Nous organisons nous-mêmes les battues », annonce Jean-Marie Quef, directeur du Domaine de l’Amaurigue au Luc, dans le Var, et président de l’Association des propriétaires de Centre-Var (APCV). Créée dès 2017, celle-ci regroupe les quatre domaines indépendants du Luc, les adhérents de la coopérative, des agriculteurs et une poignée d’autres propriétaires fonciers de la commune. Ces membres ont délégué leur droit de chasse à cette association.
Dans ce département où les sangliers pullulent, la Préfecture autorise les tirs à l’approche ou à l’affût de début juin à fin septembre. « C’est la période où il faut intervenir car c’est là que les dégâts sont les plus importants », observe Jean-Marie Quef. Or, pour les chasseurs, l’été n’est pas le moment idéal. Non seulement il fait trop chaud pour eux et pour leurs chiens, mais en plus chasser l’été n’est pas dans leurs habitudes. D’où l’intérêt de l’association : « Nous défendons notre gagne-pain », précise le président.
L’association organise en moyenne une dizaine de battues par an avant les vendanges, à l’automne et en hiver. En 2024, elle a abattu environ 15 sangliers sur les 150 ha du Domaine de l’Amaurigue. « C’est bien, mais cela ne résout pas les problèmes, considère Jean-Marie Quef. Nous sommes une dizaine de volontaires, il en faudrait quatre fois plus. »
Alors, pour se protéger, le Domaine de l’Amaurigue est passé à la vitesse supérieure en clôturant entièrement ses 50 ha avec un grillage fixe. Un chantier colossal, achevé l’an dernier après deux ans et demi de travail qui a mobilisé quatre salariés et coûté 30 000 € pour les fournitures seules.
À la sortie de Bergerac, Antoine de Corbiac « chasse peu, mais efficacement, souligne-t-il. Nous abattons plus de 10 sangliers pour 100 ha, contre 3,3 en moyenne dans les sociétés de chasse alentour. » Ici, les sangliers ne s’attaquent pas aux raisins : ils labourent les sols. L’hiver, ils arpentent les rangs de vigne, détruisent les couverts semés et les retournent si profondément que les tracteurs ne peuvent plus passer. « Une vraie galère pour les remettre en état », tempête le propriétaire du Château Corbiac Pécharmant, un domaine de 120 ha, dont 20 de vignes et 100 de bois et prairies pour nourrir un troupeau de 70 moutons.
En plus de chasser, Antoine de Corbiac piège les sangliers. Il fait partie de ceux qui ont milité pour obtenir que cela soit autorisé dans toute la Dordogne du 1er avril au 14 août. Cette année, il a obtenu le statut de piégeur agréé : il peut abattre les animaux pris dans les pièges posés chez lui. Début juillet, il n’avait pas encore pris le moindre animal. Cette méthode qu’il a mise en place l’an dernier semble avoir dissuadé les nuisibles de s’aventurer dans sa propriété.
« Après une attaque de chiens errants sur notre élevage, nous avons acquis deux chiens patous, expose Antoine de Corbiac. Nous les laissons en liberté à proximité des moutons. Depuis que nous les avons, nos poules ne se font plus bouffer. » Le 10 juillet, lorsque nous l’avons interviewé, cela faisait deux jours qu’il n’avait pas vu ses patous. « Le matin, ils ne sont pas venus à la gamelle, explique-t-il. Ils ont dû trouver du gibier par là. » Les patous, plus mortels pour les sangliers que les chasseurs ?