etit à petit crypto fait son nid. Et donne des sueurs froides aux vignerons à l’approche des vendanges, le ravageur pouvant anéantir la récolte en quelques jours en cas de forte infestation. Vignerons et techniciens l’ont donc à l’œil. Et suivent attentivement les vols pour mieux anticiper la lutte. Cette année, l’ICV a lancé une prestation de suivi dans la Vallée du Rhône. Une prestation clé en main comprenant la commande des pièges, le choix de la parcelle où il est le plus judicieux de les installer, les relevés et la diffusion des résultats. Tarif : 250 € le suivi d’une parcelle avec un piège à phéromone et un piège alimentaire et 50 € le suivi d’une parcelle supplémentaire avec uniquement un piège à phéromones. Les vignerons qui ont leurs propres pièges et opèrent leurs propres relevés peuvent intégrer le réseau et recevoir gratuitement les résultats sous réserve qu’ils partagent les leurs.
Début juillet, l’ICV avait installé près de 230 pièges dans une centaine de parcelles. « Dans chacune d’entre elles, nous avons installé un piège alimentaire et un piège sexuel car les Italiens disent que les pièges alimentaires permettent de détecter le début du vol 4 à 5 jours plus tôt. Nous relevons les pièges une fois par semaine et tous les trois jours lorsque le vol s’intensifie. Comme pour l’eudémis, le suivi des pièges permet d’appréhender la dynamique des vols de cryptoblabès mais pas de quantifier la pression. Et il faut aller dans les parcelles pour voir s’il y a des dégâts sur les grappes. Nous avons démarré le suivi la semaine du 7 juillet car l’important est de savoir si le ravageur est présent lorsque le chargement en sucre dans les baies démarre dans les zones précoces », détaille Tristan Perchoc, consultant viticole à l’ICV pour la Vallée-du-Rhône.
Les vignerons reçoivent les résultats sous la forme d’une cartographie où ils peuvent visualiser le nombre de captures dans chaque piège du réseau ainsi que des alertes via un groupe WhatsApp dédié. Et lorsque le vol s’intensifie, chacun reçoit un message personnalisé avec la stratégie à adopter selon son mode production - bio ou conventionnel. En fin de campagne, le consultant fera une synthèse de ce suivi pour ses clients et en tirera les enseignements.
De son côté en 2024 Syngenta se sert de son réseau ICARES de pièges alimentaires connectés Trapview destiné à suivre les vols d’eudémis. Cette année, la firme y a ajouté des capsules de phéromone pour attirer cryptoblabes. « De la mi-juin à fin août, nous pouvons suivre les vols de cryptoblabes en complément de l’eudémis. Nous avons ainsi plus d’une centaine de pièges dans le Sud-Est et le Sud-Ouest », explique Jean-Litoux, ingénieur solutions agroécologie vigne chez Syngenta pour la région Sud. Selon lui dès que les captures dépassent 20 à 30 individus par semaine, la question d’une intervention se pose. « Dans les secteurs où crypto arrive très tôt, les traitements peuvent démarrer juste avant la fermeture de la grappe, mais généralement ils débutent mi-juillet avec la véraison ».
Le distributeur Magne qui met en avant la double confusion pour lutter à la fois contre eudémis et cryptoblabes commercialise les pièges Trapview pour suivre les vols au prix de 500 à 600 € HT selon les options. « Les clients -des coopératives pour la plupart- les installent courant mars ou début avril pour suivre l’eudémis et aussi cryptoblabes depuis cette année. Chaque jour ils peuvent consulter les photos du piège. Nous leurs adressons des alertes selon un seuil que nous définissons avec eux en début de saison. La plupart du temps, ils veulent être alertés dès qu’un papillon est capturé », précise Valentin Nicolet, responsable des services. Preuve que les vignerons concernés veulent avoir ce nouveau ravageur à l’œil.
Christelle Stef
En conventionnel c’est Affirm/Proclaim, à base d’émamectine de Syngenta qui reste la référence contre cryptoblabes en raison de son efficacité et sa persistance d’action de 21 jours. Mais d’autres produits sont utilisables comme le Coragen à base de chlorantraniliprole (RynaXypyr), le spinosad et les BT (Bacillus thuringiensis) tout en sachant que ces derniers sont difficiles à positionner et lessivables. Les pyréthrinoïdes utilisés contre la cicadelle de la flavescence dorée ont également un effet sur crypto. Autre possibilité : les trichogrammes. « Ils sont très efficaces », assure Frédéric Clerissi, responsable technique de la cave les Vignerons de Montagnac. Mais ils sont pénalisés par leur coût et leur sensibilité au soufre. Pour les adeptes de la confusion, il existe des diffuseurs de phéromones spécifiques pour lutter contre cryptoblabes que distribuent les Ets Magne. Selon Valentin Nicolet, responsable des services « ça fonctionne dès lors que les ilots couvrent au moins 10 ha ». Mais d’autres techniciens, doutent de l’efficacité de la confusion, cryptoblabes étant polyphage et naviguant entre plusieurs cultures.