ompacts et légers, déjà bien implanté en Champagne et en Bourgogne, les pulvés sur chenillards font leur apparition dans le Médoc. À la manœuvre, un concessionnaire et deux vigneronnes : Valentine Falleur, propriétaire du tout jeune Château Pontac-Lynch à Margaux et Clémence Sibrac, sa salariée.
Valentine Falleur plante ses premières vignes -52 ares- en 2023. L’année suivante, elle récupère 67 ares du domaine, anciennement en fermage. Pour les travaux mécaniques, elle fait appel à un prestataire qui intervient avec un enjambeur. Mais les hivers et les printemps très pluvieux rendent le passage de l’enjambeur quasi impossibles à des moments cruciaux. « Rien de plus démoralisant que de ne pas pouvoir traiter quand le mildiou guette », confie Clémence Sibrac. Et quand ces passages ont eu lieu, ils causent des dégâts. « On a dû passer le motoculteur en septembre 2024 à certains endroits tellement c’était devenu impraticable dans le plantier », souligne Clémence Sibrac.
Pour éviter de se retrouver dans pareille situation et pour être autonome dans ses travaux, fin 2024 le château acquiert un chenillard Rotaire R70.3 et une cellule de pulvérisation Berthoud Mini-Trac 400H à moteur thermique auxiliaire. C’est après des discussions avec des viticulteurs champenois, habitués aux traitements sur chenillard, et avec Adel Bakache, expert en pulvérisation, que ce choix s’impose. Les vigneronnes retiennent le Rotaire R70.3 pour plusieurs raisons : sa plateforme qui emmène l’opérateur, sa largeur réduite (68 cm hors tout), son poids limité (670 kg), ses 24 ch, ses deux circuits hydrauliques indépendants de 30 l/min et 12 l/min ainsi que la facilité d’attelage des outils. « C’est bien plus polyvalent que je ne pensais, poursuit Clémence. Je passe tout en marche avant, sauf les griffes. »
Pour la pulvérisation, après neuf traitements réalisés entre mi-avril et juin, la satisfaction est là : « Je traite toutes les vignes -1 ha 20- en 4 heures, nettoyage du pulvé compris. Après la pluie, je passe là où personne d’autre ne passe. »
Pour se protéger Clémence Sibrac porte une combinaison intégrale, un masque, des gants... « On m’appelle le canari dans le village à cause de ma combinaison jaune », plaisante-t-elle. Au-delà de la maniabilité de son engin, elle apprécie aussi la précision de l’application : la proximité des buses avec le feuillage permet une couverture homogène, avec peu de dérive. « On voit vraiment les feuilles se retourner au passage, c’est propre. »
Clémence Sibrac qui n’avait jamais conduit le moindre tracteur a dû apprivoiser son chenillard. « J’ai cassé quelques fils et pieds tordus au début, mais après 70 heures, je maîtrise », claironne-t-elle. Un petit arceau métallique a été ajouté à hauteur des mains pour qu’elle puisse s’y tenir en cas de secousses.
Côté coût, l’investissement reste raisonnable pour une exploitation en bonne santé : environ 30 000 € HT pour le chenillard, 6000 € pour sa cellule.
William Cayer, technico-commercial chez Chambon, distributeur qui a équipé le Château Pontac-Lynch, l’avoue : « Ce sont elles qui m’ont fait découvrir les chenillards Rotaire et ce pulvérisateur. Depuis, on les a intégrés à notre catalogue. Pour les vignerons évoluant sur des petites surfaces à fortes valeurs ajoutées, c’est une solution redoutablement efficace. »
Benjamin Banton, co-gérant de Banton Lauret, un prestataire de service basé à Vignonet (Gironde) témoigne « Le chenillard est très utile dans des conditions extrêmes : il passe partout, même en terrain gorgé d’eau. Mais les contraintes logistiques (transport jusqu’à la parcelle), l'absence de cabine, la protection obligatoire de l’opérateur et leur faible débit de chantier limitent leur intérêt. Aujourd’hui, on privilégie les quads dans les vignes à 1,50 m, c’est plus rapide et plus souple. »