este 1 du consommateur : choisir une bouteille ou un pot réemployable, reconnaissable en rayon grâce à une vignette violette. Geste 2 : rapporter le contenant vide en magasin, et le glisser dans la borne violette, postée à l’entrée du magasin, un peu comme dans une benne de tri pour le verre à recycler. A un détail près : la machine reconnaît le contenant (grâce à son logo RCoeur et son Gencod), et rend 10 ou 20 cents de consigne, selon le type de contenant, sous forme de bon d’achat dans le magasin ou directement sur la carte de crédit. Et voilà, opération "consigne" terminée.
Un petit geste pour le consommateur… et un virage stratégique majeur dans la gestion des déchets en verre, après des décennies centrées sur le recyclage. Ce 12 juin dans le Super U de Saint-Sébastien-Sur-Loire, le lancement de ce test couronne dix ans de recherche et développement par une foule de petits opérateurs régionaux et deux ans de "coordination" de ces opérateurs par Citéo. En coulisses, ce sont désormais des centaines d’opérateurs – fabricants de contenants, laveurs, distributeurs, metteurs sur le marché, transporteurs, etc. – qui maillent le territoire et font émerger la nouvelle filière française du réemploi. « C’est un vrai levier de réindustrialisation et de souveraineté nationale », a souligné Célia Rennesson, du réseau Vrac et Réemploi.
Dans le détail, seulement 80 magasins (en Bretagne, Pays de la Loire, Normandie et Hauts de France) participent au lancement en cette mi-juin. Mais Citéo prévoit « 200 supermarchés participants d’ici juillet et 800 d’ici la fin de l’année ». Le dispositif est « interopérable » : un consommateur qui a acheté une bouteille ReUse dans un magasin A peut tout à fait la rapporter dans un magasin B équipé d’une borne. La carte des magasins et des produits concernés est disponible sur le site reflexe-gagnant-reemploi.fr
Six marques de vin participent au lancement
Coté produits, le lancement se fait avec seulement six références (trois jus de fruits, deux eaux minérales et une bière) dans des magasins Super U. Mais plusieurs autres enseignes participent (Leclerc, Biocoop, Carrefours, Auchan…), et une cinquantaine de références sont annoncées, dont six marques de vin : Café de Paris (groupe Cordier), LePech D’André, Les Celliers Associés, Oé, The Brothers et VinoConnexion.
Citéo vise 50% de taux de retour, et même 80 % à moyen terme, pour se rapprocher des 90 % en Allemagne. Mais les responsables restent prudents sur le temps que ça prendra. « On espère que fin 2026, on y sera et qu’on pourra faire le grand saut vers le déploiement national », explique son directeur général, Jean Hornain. « Ça dépendra des consommateurs, mais aussi des metteurs en marché. »
Côté filière viticole, les opérateurs du réemploi connaissent bien les freins et les réticences des vignerons. C’est d’ailleurs la seule filière qui n’a pas encore sa bouteille "standard" R-Cœur, et le vin semble bel et bien à la traîne derrière les brasseurs dans le rayon alcool. Mais selon plusieurs informations, la bouteille de vin standard est presque prête, et pourrait arriver dès début 2026. Trois modèles sont attendus (une bourguignonne, et deux bordelaises, verte et transparente). En attendant, les domaines souhaitant entrer dans le dispositif peuvent trouver leur modèle de bouteille réemployable dans le catalogue du réseau Vrac et Réemploi.
Les Bordelais de Poitevin-Lavigne parmi les pionniers
« Pour nous, c’est une phase test », explique Pierre Poitevin, des vignobles Poitevin-Lavigne (AOC Saint-Emilion et Côtes-de Castillon). Ce domaine familial a conçu une bouteille réemployable pour sa gamme The Brothers, distribuée uniquement en Grande Distribution, dans le cadre du programme ReUse. « Selon l’évolution, on basculera tout en réemployable… ou pas.» Premier apprentissage : les bouteilles « consignables », « des bouteilles lambda choisies dans le catalogue du réseau Vrac & réemploi », ne coûtent pas plus cher pour ce domaine. « On a seulement demandé des étiquettes hydrosolubles et il faut ajouter le logo réemploi ». « Le cahier des charges est drivé par Bout à Bout », opérateur du réemploi et laveur, basé à Nantes.
Cela reste malgré tout un engagement fort, « qui demande pas mal d’énergie », prévient Pierre Poitevin, plutôt fier d’avoir placé le domaine familial parmi les pionniers. Et bien sûr, cela ne suffit pas à convaincre un acheteur. Les frères Poitevin ont une stratégie commerciale volontariste : « On y va magasin par magasin, d’abord en Bretagne, où le Bordeaux se vend le plus. » L’entreprise propose aussi depuis un an la gamme « Altitude », également en bouteilles réemployables mais ciblant les CHR et en circuit fermé (le domaine gère son stock de bouteilles, sérigraphiées à son nom), via le distributeur de boissons C10 et le laveur Bout à Bout. Les restaurateurs sont livrés « à flux tendus », sur le modèle utilisé par les brasseurs. « Ça demande de l’énergie de jongler sur les différents marchés. Mais les restaurateurs sont satisfaits, ils ont déjà l’habitude du réemploi. Le plus difficile sera de convaincre les cavistes. »
La bouteille bordelaise adaptée au réemploi par les vignobles Poitevin-Lavigne.