Je ne peux vivre sans champagne, en cas de victoire, je le mérite, en cas de défaite j'en ai besoin » disait Napoléon. Pour la maison G.H. Martel et Cie (famille Rapenau, Reims), en cas de Victorie, on peut aussi imaginer que le champagne soit nécessaire… Ce premier avril, la troisième chambre commerciale de la Cour d'appel de Rennes juge que « la société Champagne Martel ne peut pas se prévaloir d'actes de contrefaçon à l'encontre de ses marques » Champagne Victoire et dérivées (déposées depuis juin 2009) en attaquant en 2021 les marques Victorie et Victorie l’Audacieuse pour des vins rosés du Luberon du groupe Grands Chais de France (GCF, via sa filiale Lacheteau depuis octobre 2003 en France).
Alors que l’Office de l'Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) et l'Office anglais des marques (IPO) « ont fait droit aux oppositions formées par la société Champagne Martel » en 2022 et 2023, le tribunal judiciaire de Rennes avait débouté les champagnes Martel en validant l’usage des marques de GCF. Ce que la cour d’appel a confirmé ce printemps. « En prenant en compte tous les facteurs pertinents (type de vins, réseaux de commercialisation, moments de consommation…), il y a lieu de considérer que les produits en cause présentent une certaine similarité » reconnait le jugement, allant dans le détail : « visuellement, les marques revendiquées sont composées du mot VICTOIRE qui est très proche du mot VICTORIE utilisé dans le signe contesté. Seules les lettres I et R sont interverties au sein des signes qui sont composés de 8 lettres chacun dont 5 lettres VICTO placées dans le même ordre et la lettre finale E ». Mais « phonétiquement », les deux termes « sont éloignés » comme « VICTOIRE est composé de 2 syllabes tandis que l'élément VICTORIE est composé de 3 ».


Se penchant avec le même sérieux sur les éléments non-verbaux, la cour d’appel pointe que « les signes en cause se rapprochent en ce qu'ils sont constitués d'éléments végétaux, des rames de laurier pour la société Champagne Martel et des fleurs pour les sociétés Lacheteau et Les Grands Chais », mais « visuellement, l'impression d'ensemble des signes produite est différente. Les signes en cause présentent un faible degré de similarité. » Au final, « il n'existe pas de risque d'association pour le public qui ne sera pas amené à considérer que les parties sont liées économiquement ou que les produits proviennent de la même entreprise » tranche le délibéré, pour qui « il apparaît ainsi qu'il n'est pas établi que l'impression d'ensemble produite par les signes en cause a pu générer un risque de confusion dans l'esprit du public. »
Mais comme le disait Napoléon, « le succès ne s'explique pas. L'échec ne s'excuse pas. »