n 2024, le regroupement coopératif gardois des Vignerons Créateurs (5 caves pour 80 adhérents et 1 000 hectares de vignes) célébrait le centenaire de deux de ses caves : Jonquières Saint-Vincent et Bellegarde. En 2026, cela aurait été le tour de la cave de Saint-Gilles si elle n’avait pas fermé en 2011, puis en 2027 celle de la coopérative de Manduel si elle n’avait pas baissé le rideau en 2017. En 2029, la cave de Bouillargues ne pourra pas non plus célébrer ses 100 ans d’existence, ayant rentré sa dernière récolte ce millésime 2024 pour anticiper la baisse de production des prochaines années.
Une restructuration imposée par la réduction du potentiel de production qui s’annonce. Sur les trois prochaines années, les Vignerons Créateurs devraient perdre 200 ha de vignes rapporte Frédéric Sénac, le directeur général du regroupement, qui pointe que l’« on retombe dans les travers de la fin des années 2000 », lors de la dernière campagne d’arrachage primée (qui avait abouti à la création de l’union coopérative en 2009). Sachant que la pression pesant sur le vignoble faute de rentabilité est accentuée par la concurrence sur le foncier de l’arboriculture (les terrains de la zone étant ayant accès à l’irrigation).
Dotée de 60 000 hectolitres de capacité, la cave de Bouillargues va prochainement être mise en vente, sans doute pour aboutir à un projet immobilier. Les apporteurs de Bouillargues seront redistribués vers les sites de Bellegarde et Jonquières Saint-Vincent. Employant 16 personnes, les Vignerons Créateurs ne prévoient pas à date de réduction de la masse salariale. Optimisant son diviseur de coûts de production avec cette fermeture, l’union coopérative espère ne pas avoir à faire le dos rond trop longtemps. « Parmi les producteurs qui restent, on ne sait pas combien continueront si la crise actuelle continue » prévient Frédéric Sénac, qui appelle les coopératives à anticiper les restructurations de leurs outils de production et les rapprochements avec d’autres caves pour optimiser leurs outils.


« Il faut restructurer les caves en sortant de ce tabou [des clochers et villages concurrents]. Il faut anticiper les pertes de volumes apportés pour ne pas tomber sous le seuil critique [d’un volume de production coûtant plus qu’il ne rapporte], sinon des caves coopératives risquent de mettre la clé sous la porte » craint le directeur, pour qui « il faut une discussion entre caves pour faire en sorte que les outils fonctionnent à leur pleine productivité. Nous sommes des outils industriels. Nous sommes challengés sur nos performances économiques. Il faut les volumes et la matière première nécessaires. » Car au final, « nous faisons face à une réalité économique difficile. Notre devoir en tant que dirigeant de cave, c’est de garantir la stabilité des acomptes » conclut Frédéric Sénac.