Le marché des tracteurs spécialisés baisse pour la troisième année consécutive, s’alarme Marwan Bassil, directeur général adjoint de Same Deutz-Fahr France. Devant ce constat, tous les tractoristes sont mobilisés pour accompagner les viticulteurs qui ont besoin d’investir. » Les firmes jouent ainsi sur plusieurs tableaux afin d’offrir de meilleures conditions tarifaires ou de financement.
Un de leurs leviers consiste à réduire leurs marges – sans aller jusqu’à diminuer leurs prix au catalogue – afin de donner davantage de champ à leurs concessionnaires pour qu’ils puissent pratiquer des rabais. Jusqu’où ? Impossible de le savoir. La discrétion est de mise sur ce sujet.
En revanche, les constructeurs parlent bien plus volontiers de leurs autres leviers, comme les crédits. « Actuellement, le taux moyen pour un prêt classique est de 4 %, mais nous l’abaissons à moins de 3 % en prenant en charge une partie de l’emprunt, illustre Marwan Bassil. Nous menons aussi des opérations spéciales avec un taux à 0 % sur des tracteurs d’entrée de gamme à partir de 50 000 €. »
John Deere fait aussi des offres. « En étant associé au Crédit Agricole, nous avons accès à des taux avantageux que nous bonifions, avance Thibault Vandenberghe de John Deere Financial. En septembre, nous avons proposé des prêts pour un tracteur avec cinq échéances au taux de 1,85 %. »
Également en partenariat avec le Crédit Agricole, jusqu’au 31 mars prochain, Pellenc fait bénéficier à ses clients de prêts sur trois ans à taux 0 et à des taux « attractifs » pour des durées plus longues. « Vu la conjoncture, nous avons voulu faire quelque chose pour nos clients », explique l’entreprise.
Même s’il reste prédominant, le prêt classique perd du terrain au profit du crédit-bail, appelé aussi leasing. S’il coûte souvent plus cher que le crédit classique, il n’impacte pas le taux d’endettement, le matériel ne figurant pas à l’actif de l’entreprise tant qu’elle n’a pas levé l’option d’achat. Autre intérêt du crédit-bail : étant moins plafonné que le crédit classique, il peut financer une plus grande partie de l’investissement. L’apport personnel de l’emprunteur s’en trouve réduit. Des arguments qui comptent en période de crise.
« Le crédit-bail séduit les nouvelles générations qui sont moins sensibles au sentiment de propriété, observe Cécile Gagniac chez CNH Capital. Avec notre solution CapFlex, les emprunteurs peuvent moduler le montant et la durée des annuités, en cours de prêt, pour s’adapter aux variations de leur activité. Et avec les fortes augmentations de prix du matériel, le crédit-bail évite d’allonger la durée d’amortissement alors que c’est souvent le cas avec le crédit classique. »
Autre levier pour préserver sa trésorerie, l’acheteur a la possibilité de jouer sur la valeur de rachat du matériel pour faire baisser les échéances. « C’est intéressant quand on souhaite renouveler régulièrement son matériel, mais aussi pour limiter les impacts fiscaux liés à la revente du bien », indique Cécile Gagniac. Dernier point : le crédit-bail offre davantage de visibilité sur les charges de mécanisation lorsqu’il englobe l’entretien et la garantie du matériel.
Encore moins répandue mais de plus en plus adoptée par de grands domaines, la location financière propose un coût fixe, sans option d’achat. Un autre moyen de ne pas intégrer le matériel au bilan de l’exploitation et donc de ne pas impacter le taux d’endettement. « Les structures qui optent pour cette formule raisonnent en coût à l’heure. Elles veulent disposer d’un matériel dernier cri renouvelé tous les deux ou trois ans, ce qui est la durée moyenne des contrats », illustre Cécile Gagniac.
« La capacité de financement des viticulteurs dépend de plus en plus des aides publiques, observe Jérémy Loizeau, technico-commercial chez Modema. Depuis la mise en place du plan de relance, dont les aides sont débloquées en début et en milieu d’année, les projets d’investissement sur les matériels éligibles ont tendance à se concentrer sur ces deux périodes. » Une contrainte de plus pour les viticulteurs qui n’ont d’autre choix que d’être à l’affût du déblocage des enveloppes et qui doivent faire preuve de réactivité pour le montage de leur dossier. « Certains vignerons font désormais appel à des cabinets de consultants pour ne pas passer à côté des aides », souligne Fabrice Dulor, directeur de Boisselet. Un système qui favorise les plus réactifs, parfois au détriment des plus nécessiteux.