rocès fleuve, le dossier de traite des êtres humains par des prestataires de services viticoles qui vient tout juste d’être audiencé par le tribunal de Bordeaux doit encore être jugé, mais doit déjà alerter la filière vin, qui doit revoir urgemment son mode d’emploi saisonnier face aux pratiques d’un autre temps qui perdurent encore : horaires extensifs, absence de pause, pression démesurée à l’efficacité... Pour un travail de forçat, où seul l’abattage compte : de quoi épuiser les hommes et pas de quoi valoriser le vignoble. Cette boîte noire du travail à la tâche vire à la tache pour toute la filière.
Des difficultés de recrutement (avec la disparition des saisonniers habituels) à la pression administrative (et l’externalisation de sa charge), les raisons d’un recours croissant à la prestation de services sont multiples, mais il reste à la fin un seul donneur d’ordre : le vigneron qui bénéficie de l’équipe de saisonniers. La surveillance est un devoir qui lui incombe. Les bas prix pratiqués et les mines exténuées sont des indicateurs qui doivent alerter pour réagir. Si ce n’est par humanisme, au moins par pragmatisme face à l’image du travail viticole en particulier et de la production de vin en général.
Il y a encore quelques années, les enjeux de Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) pour l’emploi viticole semblait se limiter à la gestion des Troubles Musculo Squelettiques (TMS). La filière des vins français avait un regard aussi critique que lointain sur les affaires d’esclavage moderne défrayant la chronique en Afrique du Sud. Désormais, le recours croissant à des saisonniers venant d’Afrique du Nord et d’Europe de l’Est l’oblige à s’impliquer pleinement dans la lutte contre toute forme d’asservissement dans ses parcelles, chais et entrepôts. Les opérateurs ne peuvent ne peuvent plus se contenter d’un "je ne savais pas" et ont à se fixer une ligne claire d’inflexibilité et d’exemplarité. « Tant que le possible n'est pas fait, le devoir n'est pas rempli » déclarait Victor Hugo dans son discours pour « détruire la misère » il y a 185 ans, le 9 juillet 1849 à l’Assemblée Nationale.