vec la création de Cyrhus, un vin 100 % syrah, Masrour Makaremi, orthodontiste et neuroscientifique, installé à Bergerac, en Dordogne, entretient le souvenir du vin persan. Né à Shiraz, en Iran, dans une famille « engagée dans la défense des libertés », il est arrivé en France à l’âge de 10 ans comme réfugié politique après l’emprisonnement et le décès de sa mère. Cette cuvée est un hommage à sa ville natale, la syrah pouvant être dénommée shiraz, et à l’histoire vinicole millénaire de son pays « que le régime actuel a effacée », raconte-t-il.
En 2016, il rencontre Grégory Dubard, à la tête des Vignobles Dubard, à Saint-Méard-de-Gurçon (24), qui l’aidera à faire aboutir son projet. La même année, il achète et plante deux hectares de shiraz (syrah) dont il confie l’exploitation à Grégory. Pour Masrour, le projet ne pouvait se faire qu’avec ce cépage, même s’il savait parfaitement qu’il était originaire de la vallée du Rhône.
Shiraz était la capitale du vin à l’époque de l’Empire perse et ultérieurement. Des vins, dont bien des poètes persans – Roudaki, Rûmî, Hâfez, Omar Khayyâm… – ont chanté les louanges au fil des siècles. Des vins qui, au XVIIe siècle, étaient particulièrement renommés et qui s’exportaient déjà dans d’épaisses bouteilles de verre.
Cyrhus est vinifié en cuves, puis élevé deux ou trois mois dans cinq jarres de 500 l de terre cuite. « Ces jarres sont poreuses. Avant de les donner à Grégory, j’ai enduit leur face interne de résine de pistachier pour les imperméabiliser et les aseptiser, comme le faisaient les Perses il y a des siècles. C’était très important pour moi de reproduire ce geste ancestral », souligne Masrour Makaremi.
S’il a nommé son vin Cyrhus, « c’est en hommage à Cyrus le Grand, fondateur de l’empire perse en 559 avant J.-C. et dont les valeurs humaines – tolérance et bienveillance – sont celles que je voulais insuffler à mon projet ». Sur l’étiquette, il reproduit son tombeau, situé à Pasargades, en Iran, sur fond rosaces persanes dans les bleus profonds de Shiraz et d’Ispahan. Son coffret reprend la transcription d’un cylindre d’argile de Cyrus le Grand gravé d’une proclamation du roi après sa victoire sur Babylone « autorisant la liberté de culte et abolissant l’esclavage », interprète Masrour (*).
Cyrhus est une petite cuvée que Masrour vend 39 € le col, dans son étui et exclusivement sur son site internet cyrhus-wine.com. 5000 bouteilles du millésime 2023 sortiront cet automne. « Cette cuvée, c’est un peu un acte de résistance. Je fais revivre le vin perse en France avant de le faire un jour en Iran », espère-t-il. Pour faire connaître son initiative, il poste régulièrement des photos de sa cuvée sur Instagram dans des paysages iraniens, avec des mets, entourée de calligraphies de son père Hassan ou de textes poétiques.
(*) Selon de nombreux historiens, il s’agit avant tout d’un texte de propagande royale.