La baisse moyenne de 24% de l’IFT hors biocontrôles des volontaires du réseau Dephy est encourageante mais l’ensemble les viticulteurs adoptent trop peu de mesures agro-environnementales pour que l’impact des produits phytosanitaires diminue à l’échelle des territoires » pose Marc Voltz, chercheur à l’Inrae, lors de la 15ème Journée Scientifique Vigne & Vin organisée à l’Institut agro de Montpellier ce 7 mars.
Pour impulser de plus grands changements, Marc Voltz et ses collègues du projet Ripp-Viti ont eu l’idée de réunir autour d’un plateau de jeu plusieurs viticulteurs d’un territoire et des « experts », issus d’AOP, de coopératives, de Chambres d’Agriculture, de FREDON, de l’IFV, ou de l’Agence de l’Eau. « Nous avons joué avec des groupes de viticulteurs du bassin du Rieutort, situé au nord de Béziers, car ce bassin présente une grande diversité de terroirs et des modes de production reflétant l’ensemble des exploitations du Languedoc » décrit le chercheur.
Chacun des participants s’est vu attribué le rôle de viticulteurs ou de « gestionnaire » pouvant mobiliser des actions incitatives, « telles que des subventions à certaines pratiques ou matériels, ou des formations » ou contraignantes, « sur l’achat de foncier ou l’interdiction de certaines molécules » illustre Marc Voltz.
Les joueurs viticulteurs devaient s’imaginer travailler soit en coopérative (100% IGP ou mixte IGP-AOP avec labellisation HVE, soit en cave particulière en AOP Saint-Chinian, soit en cave particulière en AOP Saint-Chinian et en bio. « Pour plus de réalisme local, nous avons décidé de jouer deux types d’années différentes, plus ou moins humides et donc plus ou moins favorables au mildiou. Les viticulteurs devaient choisir des pratiques alternatives sur trois îlots différents : l’un proche d’habitations, les deux autres différents par leurs types de sol, pente, et réserve utile ».
Au cours des différentes parties, presque tous les joueurs viticulteurs ont décidé de mettre en place une haie pour limiter la dérive de pulvérisation. Tous se sont mis d’accord avec leurs « voisins »pour adhérer à un GDON et réduire leur nombre de traitements contre la cicadelle sur tous leurs îlots. Ils ont également décidé d’enherber leurs tournières sur toutes leurs parcelles et de se former aux réglages du pulvérisateur et à la gestion des maladies fongiques avec des produits de biocontrôle. Beaucoup ont demandé subventions pour changer de buses ou de pulvérisateur.
« En coopérative, 2 viticulteurs sur 7 ont décidé de maintenir leurs pratiques de désherbage du rang habituelles sur l’îlot proche des habitations. Les autres ont opté pour moins de glyphosate, moins de labours, ou un enherbement de l’inter-rang, illustre encore Marc Voltz. Pour ce qui est de la gestion fongique, beaucoup se sont contentés du 0 CMR mais certains ont envisagé passer en bio ou planter des cépages résistants ».
L’agrégation de toutes les stratégies construites par les joueurs amène à 90% de baisse d’utilisation de produits CMR et 39% de baisse de l’IFT tout en améliorant la durabilité des exploitations.
L’équipe du projet Ripp-Viti a mis en ligne un ensemble de fiches décrivant les intérêts agronomiques et environnementaux de chaque levier de réduction d’usage des phytos proposé dans le jeu, et des fiches évaluant les combinaisons de leviers proposées lors pour chaque type d’exploitation type du bassin versant. « Tous les viticulteurs peuvent ainsi consulter la fiche de l’exploitation la plus proche de la leur et s’en approprier les résultats » termine Marc Voltz.
La Chambre d’agriculture de l’Hérault travaille sur une nouvelle version du jeu dans l'idée de le déployer.