gri’scopie est l’outil qui compile depuis 2016 les chiffres-clés de l’agriculture en Occitanie. Dans « la première région agricole de France » (3 millions ha, 64 000 exploitations), l’ombre de la viticulture n’est jamais loin. L’Occitanie est également la première région viticole, hébergeant 273 000 ha de vignes réparties sur les deux bassins Languedoc-Roussillon et Sud-Ouest. Les 12 millions d’hectolitres générés représentent quant à eux 31% des volumes de vins produits en France.
Après les secteurs aéronautique et spatial, et le tourisme, agroalimentaire et agriculture constituent le 3ème pilier de ressources régional, la seule agriculture génèrant à elle seule un chiffre d’affaires de 7 milliards €, dont 1,4 Md € du fait de la viticulture et ses « 14 200 exploitations pourvues d’un atelier viticole », explique Nelly Dubosc, coordinatrice du pôle économie de la chambre régionale d’agriculture. Derrière ces chiffres valorisant une région riche de sa production viticole, surgissent néanmoins des incertitudes autour des enjeux d’avenir. « Les chiffres de la MSA nous font part d’un niveau important de départs en retraites dans les cinq ans à venir. Une exploitation sur deux est menée par un dirigeant de plus de 55 ans », présente le président de la chambre d’agriculture régionale Denis Carretier. Pour la viticulture, ce sont 42% des chefs d’exploitations qui sont âgés d’au moins 55 ans.


Atteignant 70%, le taux de remplacement y est pourtant plus élevé qu’une moyenne nationale à 61%. Mais entre multiplication des stress climatiques, dépendance de la filière viticole régionale aux marchés export et difficultés des vins sur les marchés, le président de la chambre d’agriculture d’Occitanie souligne l’importance de l’innovation mais n’hésite pas à affirmer que « sur certains territoires régionaux, la viticulture ou l’arboriculture seront vouées à l’arrêt, faute de ressources suffisamment productives ». Claire Vingut, responsable de l’équipe eau de cette chambre régionale, explique en effet que le climat observé dans la région en 2022 « où canicule forte et sécheresse prolongée se sont côtoyées, préfigure probablement ce que l’on retrouvera en 2050 ». Les niveaux d’évapotranspiration records enregistrés dans ce cas de figure « doivent impérativement être compensés par une quantité suffisante d’eau, sans quoi la plante meurt, sans parler du développement de pathogènes induits par ces conditions et affectant les qualité et quantité de production ».
Le président de la Chambre régionale souligne la plus-value apportée par l’irrigation. La part de surfaces irriguées en Occitanie a augmenté de 14% entre 2010 et 2020. « 30% de la surface agricole est aujourd’hui irriguée, et contribue à 48% de la valeur ajoutée générée par le secteur. Les différences qualitatives et de rendement entre les zones irriguées et les autres peuvent déjà créer des sentiments d’injustice voire de jalousie entre opérateurs. L’accès à l’eau est un sujet central », appuie Denis Carretier. Ce dernier entend donc maintenir le cap d’entretien et de modernisation des réseaux d’acheminement existants, « qui ont permis d’économiser 180 millions de m3 en 15 ans », mais appuie surtout le besoin d’installer des retenues collinaires « qui ont du sens par leur vocation multi-usages, à la fois pour que les milieux naturels en bénéficient mais aussi pour le maintien des habitants et du tourisme, ainsi que les productions agricoles ».
S’il reconnaît une météo des marchés viticoles en Occitanie loin d’être au beau fixe, Denis Carretier n’y voit pas une raison d’envisager des mesures d’arrachage. « Diminuer notre offre favorisera plus d’importation », affirme celui qui milite pour une production de vins sans IG plus importante dans la région. Il reconnaît cependant qu’entre mildiou et épisodes climatiques, la récolte viticole de l’année 2023 devrait être moindre dans les bassins d’Occitanie, peut-être un mal pour un bien au regard des difficultés de marché actuelles.