oute mobilisée qu'elle était pour mettre un terme aux rumeurs de hausse de la taxation des vins (craintes concentrées par la campagne à succès de Vin&Société : « ce qui va vraiment saouler les Français ») ou aux enquêtes chinoises anti-dumping et anti-subvention (dont la procédure semble inébranlable), la filière française semble avoir oublié la victoire du vignoble européen sur les droits de plantation. La conclusion de cette épopée de la régulation du potentiel de production était pourtant loin d'être acquise. Fixée au 31 décembre 2015 par l'Organisation Commune du Marché viticole de 2008, la suppression des droits de plantation viticoles au sein de l'Union Européenne semblait on ne peut plus actée. Suscitant réflexion et mobilisation dans les principaux pays producteurs, le débat sur le maintien des Droits de Plantation avait conduit à une inflexion de la position de la Commission Européenne fin 2012. Cette réussite n'a pas été sans difficultés, « cela ressemblait même à un pugilat... » se rappelle Thiery Coste (président du groupe de travail vin de la COPA-COGECA ). A l'issue du Groupe de Réflexion à Haut Niveau, « le fond était toujours libéral, notamment avec un principe d'autorisation automatique, mais un premier pas était fait ».
S'il semblait acquis que la plantation de vignes en Europe ne serait pas libéralisée après 2015, le travail de lobbying était intensif en coulisse, pour définir le pourcentage de nouvelles plantations, ainsi que les dates d'entrée en vigueur du système et ses modalités de reconduction. Les négociations ont été tendues d'emblée, le Parlement Européen proposant en janvier le maintien tel quel du système des droits de plantation jusqu'en 2013. Précisant qu'il s'agissait de préparer « le berceau [législatif] nécessaire au nouveau système », le député européen Michel Dantin nous expliquait qu'« un certains nombres d'ajustements restent nécessaires. Notamment la date de révision du système des droits de plantation. Je rappelle que par un arrêt, la Cour Européenne de Justice a donné l'obligation de borner le système. » Proposant que le système se finisse en 2024, le Conseil des Ministres Européens fixait alors le curseur du renouvellement du vignoble à 1 % des surfaces (contre 0,5 % pour le Parlement).
Réunissant le rapporteur du Parlement Européen (le député Michel Dantin), le cabinet de la Commission Européenne et le représentant du Conseil des Ministres (à ce moment, il s'agissait de la présidence irlandaise), le trilogue a connu des négociations difficiles sur ces points. Au final, le compromis trouvé in extremis met en place un système d'autorisation de plantation, fixé à 1 % et en vigueur de 2016 à 2030. « C’est une victoire des hommes de terrain et des terroirs contre les idéologues » se réjouissait alors Jean-Paul Bachy (président de l’Assemblée des Régions Européennes Viticoles). Actuellement des négociations continuent au niveau national pour déterminer les modalités de gestion des autorisations de plantation.
[Illustration : Parlement Européen, Europarl]