« Il suffit d'aller dans un salon professionnel chinois pour constater la visibilité des contre...

Traçabilité : authenticité des vins, du flash de l'étiquette aux tests de bouteilles

 Il est bon de copier ses maîtres » aurait dit le sage Confucius, une pensée qui inspire bien des fraudeurs dans l'Empire du Milieu qu'il a éduqué. « Il suffit d'aller dans un salon professionnel en Chine pour constater la visibilité des contrefaçons » témoigne Jean Belaube (directeur administratif du Conseil Interprofessionnel des Vins de Bordeaux). « Mais attention, il n'y a pas qu'en Chine que nos vins pâtissent de la contre-façon ! » Dans un marché de plus en plus mondialisé, préserver la confiance du consommateur est une nécessité absolue, la sécuriser revenant à garantir la valeur ajoutée des vins exportés. L'enjeu passionne autant qu'il inquiète les professionnels qui suivaient la deuxième édition de la journée WineTrack, organisée par l'Institut Scientifique de la Vigne et du Vin (Université de Bordeaux) pour la Société des Experts Chimistes de France ce 30 octobre. Par leur profusion (comme lors du dernier salon Viteff), les stands d'outils et de solutions d'authenticité en témoignaient : passeport de Qual-Id, Web Track d'Abciss, authentification numérique d'Advanced Track & Trace, textos de Cedar Code... Les professionnels n'ont alors plus que l'embarras du choix, sauf quand leur ODG leur conseille une solution (c'est le cas du Syndicat des Bordeaux et Bordeaux Supérieurs qui a sélectionné Tesa Scribos).

En théorie, la traçabilité n'est pourtant que le fait d'« assurer l'information tout au long des processus de production, de la chaîne d'approvisionnement et du circuit commercial » résume Jean-Claude Ruf (chef de l'unité œnologique d'analyse de l'OIV). Dans la pratique viticole, « le documentaire établit la chronologie de l'élaboration, avec les déclarations annuelles de stock, de récolte, les revendications volontaires d'AOC... » illustre Jacques Gautier (inspecteur national vin à l'INAO). Face à cette somme de données, l'enjeu est de les mobiliser pour que leur accès soit possible en dehors du territoire. Matthias Grima (Douanes) présentait à cet effet le projet d'aubette 2.0, qui permet de veiller à l'authenticité des documents de traçabilité présentés dans un pays tiers. Il rapporte qu'il y a un « consensus sur un socle commun national en cours, qui prendra la forme d'un document administratif électronique qui sera ouvert aux autorités d'un pays tiers ». Présenté officiellement ce 19 décembre lors d'un Conseil Spécialisé de FranceAgriMer, ce projet douanier fait écho à la plate-forme bordelaise VRAI, qui milite aussi pour l'authenticité, qui devrait être en activité autonome pour 2015, en complément de l'application SmartBordeaux (qui permet de vérifier l'existence d'une marque ou d'un château de Bordeaux)

Ayant amené avec lui des flacons de « Bordeaux AOC Minervois » et autres « Château Muoton Raschtseisces », Bernard Médina (Service Commun des Laboratoires de Gironde, photo) soulignait que s'il est parfois « facile de reconnaître une contre-façon du premier coup d'œil, il reste toujours la question de ce qu'il y a dans le flacon... » Enjeu sanitaire qui permet également de pallier l'absence de données de traçabilité (ou de répondre à un soupçon de falsification), et de fournir des moyens de reconnaissance et à partir des éléments de la bouteille même. Développées depuis les années 1990 pour contrôler la chaptalisation, ces méthodes de mesures ne se résume plus à la Résonance Magnétique Nucléaire. L'utilisation des isotopes c'est notamment développée, la répartition de ces éléments dépendant du lieu de production. « Le césium est ainsi un très bon indicateur d'authenticité géographique » estime d'expérience Cécile Chabirand (laboratoires Eurofins). Le docteur François Guyon (SCL 33) précise qu'une banque de donnée européenne permet d'avoir une empreinte des lieux de production et même des millésimes, ce qui est « révélateur de falsification, mais nécessite une enquête de terrain pour confirmer ».

De nombreuses recherches ouvrent également le champ des possibles, comme celles du docteur Philippe Darret (ISVV). Ses travaux sur les composants aromatiques montrent qu'il serait possible de déterminer à partir de tests de chimie fine des modalités et typicité de production. Selon le type de lactones d'un vin liquoreux, il serait envisageable de vérifier s'il s'agit bien de pourriture noble ou de passerillage. La spectrométrie Raman sur la luminescence permet également d'analyser les bouteilles telles quelles, comme la radioactivité ultra faible pour les verres de bouteilles.