Aujourd’hui, 50 % des viticulteurs ont plus de 55 ans. » Cédric Carcenac, vigneron à Montans (81) et président de la Maison des Vins de Gaillac, introduit ainsi la journée dédiée à l’installation et à la transmission en viticulture organisée ce 24 mars à Albi (81). Le renouvellement des générations est un enjeu majeur pour les organisations professionnelles gaillacoises, partenaires de cet évènement lancé par la chambre d’agriculture du Tarn. « L’un des objectifs est de rapprocher de futurs cédants d’exploitation avec de potentiels repreneurs », explique Christine Vaysse, conseillère point accueil Installation/Transmission à la CA81.
Parmi la trentaine de personnes présentes, une petite dizaine de vignerons sont à la recherche d’un repreneur. C’est le cas de Christian Hollevoet. Propriétaire du domaine de la Chanade à Souel, il a attendu ses 70 printemps pour se résoudre à l’idée que son fils ne prendrait pas sa suite. Désormais, il cherche un repreneur hors cadre familial. « Il faut passer la main, et mon fils ne souhaite pas reprendre le domaine de 34 ha que j’ai créé en 1996 », raconte-t-il, un brin fataliste.
Lors des speed-datings organisés durant l’après-midi, il n’a pas trouvé d’acheteur. « Le projet des candidats n’est pas toujours très clair. Un monsieur m’a même demandé si cela ne serait pas plus simple que je vende une partie de mes raisins à une coopérative plutôt que de vinifier et tout vendre en bouteille. » Une idée qui l’a laissé perplexe alors qu’il a construit des débouchés solides qui assurent la pérennité de son domaine. Mais tout cela à un coût. Christian Hollevoet veut vendre sa propriété entre 800 000 et 1 million d’euros. Qui peut investir une telle somme dans un domaine à Gaillac ?
La problématique de Marc Bretou, la soixantaine passée et propriétaire d’une exploitation familiale de 13,5 ha à Lisle-sur-Tarn, est tout autre. « J’ai deux enfants de 22 et 26 ans qui n’ont pas l’ambition de reprendre pour le moment. Mais ça me blesserait de devoir la vendre. » Espérant qu’un jour ses enfants suivent sa trace, il cherche à louer son exploitation ou à la mettre en location-vente. Marc Bretou est coopérateur. Il n’a pas de chai. Un handicap car les candidats à une reprise venus ce jour ont plutôt le projet de s’installer pour vinifier et vendre toute leur production en bouteilles.
Propriétaire du domaine de Crabet à Castelnau-de-Montmirail, Christian Malet, 60 ans, vend tout : « Les vignes, la maison et le caveau où je vends des vins de Vinovalie, ma coopérative. Il y aurait même un endroit pour installer un chai. » L’exploitation qui compte 36 ha est dans sa famille depuis le XVIIIe siècle, mais il a dû se résoudre à la mettre en vente il y a deux ans, son fils ne souhaitant pas lui succéder. « Il a travaillé pendant un moment avec moi, mais il a pris une autre voie. Je peux le comprendre car notre métier supporte beaucoup de contraintes : l’administratif, qui est de plus en plus fastidieux, les difficultés à recruter du personnel, la pression sociétale associée aux enjeux environnementaux. »
Outre qu’elle n’a pas de chai, son exploitation présente un autre inconvénient aux yeux des potentiels repreneurs, elle est bien trop grande. « Il y a un décalage entre la taille des exploitations à reprendre et ce que cherchent les potentiels repreneurs, constate Roland Le Grand, vigneron coopérateur, chargé du dossier Installation/Transmission à la chambre d’agriculture du Tarn. Beaucoup de repreneurs cherchent des petites surfaces – 5 à 6 ha – pour vinifier eux-mêmes et plutôt en bio ou biodynamie alors que la taille moyenne des exploitations dépasse souvent 10 ha. »
Une solution pourrait être de proposer à des candidats d’acheter une exploitation à plusieurs puis de se partager les vignes à hauteur de montant versé par chacun et d’utiliser le chai en commun. L’idée est à creuser…