cquitator deviendra-t-il le Terminator des conflits de voisinage pesant sur la vie rurale ? « Si l’on n’aime pas la campagne, on reste en ville. Si on va à la campagne, on s’adapte à la campagne qui préexiste » pose Éric Dupond-Moretti, le ministre de la Justice, lors d’une point de presse ce 3 mars au Salon International de l’Agriculture (Paris) sur le stand de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA). Présentant l’idée d’une proposition de loi « normalement » prévue pour septembre 2023 sur la responsabilité civile, le garde des Sceaux explique que « l’idée est qu’un voisin ne peut pas se plaindre pour des nuisances qui préexistent à son emménagement. C’est clair : "c’est moi qui vais m’installer près de chez vous, ce n’est pas à vous de faire l’effort". Le monde agricole, il y a du bruit, il y a des gens qui se lèvent le matin et qui partent avec le tracteur et qui interdisent quoi à d’autres ? De faire la grasse matinée. Pour moi, c’est celui qui vient d’arriver qui doit s’adapter à l’autre. »
De quoi satisfaire les vignerons se heurtant à des conflits de voisinage sur l’usage nocturne/matinal d’outils antigel, de tracteurs et autres machines à vendanger… Le périmètre exact de la proposition de loi est encore à préciser, notamment sur les enjeux de traitements phytosanitaires (par exemple sur la préexistence des parcelles et la construction de bâtiments) : « l’idée est de régler tous les points, les précisions viendront, même si nous avons moins la main sur une proposition qu’un projet de loi » précise à Vitisphere le cabinet du garde des Sceaux. Des précisions qui sont également attendues pour appliquer la loi du 29 janvier 2021 « visant à définir et protéger le patrimoine sensoriel des campagnes françaises », dite loi du coq Maurice (du nom d’un conflit sur le chant d’un coq) qui repose sur un inventaire sensoriel qui n’a pas encore été réalisé en région (odeurs, bruits…).


Pesant sur le moral de la ferme France, les conflits croissants de voisinages sont « liés à la verticalité de la société. Les uns et les autres s’opposent avant d’essayer de se parler » esquisse Arnaud Gaillot, le président des Jeunes Agriculteurs. Avec l’arrivée de nouvelles populations dans le milieu rural, des histoires toujours plus surprenantes sont rapportées par Sébastien Windsor, le président des Chambres d'Agriculture France, évoquant des tensions sur des moissons la nuit, sur des vaches qui meuglent à toute heure… Des « cas surréalistes » qu’il faut éliminer pour « désencombrer » les tribunaux estime Éric Dupond-Moretti : « je le dis sur le ton badin, mais ça génère plein de procès. Il ne faut pas emmerder ceux qui travaillent. On va envisager un texte qui redise très clairement les choses. Qui remette l’église au centre du village. Parfois, même les cloches sont jugées gênantes. »
Une position « très raccord avec ce qu’a dit hier Bruno Le Maire [le ministre de l’Économie]: "on a une France désindustrialisée, je ne veux pas que l’on fasse la même chose avec l’agriculture". En effet ces questions de voisinage sont là » souligne Christiane Lambert, la présidente de la FNSEA. « Je le dis de façon simple, voir simpliste : l’idée est là. Que l’on ne vienne pas vous ennuyer, vous faire de faux procès » martèle Éric Dupond-Moretti