l n'a pas hésité à anticiper : « j’ai augmenté mes salariés permanents de 5 % en juin avant qu’ils me le demandent. Et je les ai encore augmentés fin 2022 pour tenir compte de l’inflation », indique Raphaël Dubois.
À la tête du domaine éponyme, 22 ha à Premeaux-Prissey en Côte-d’Or, ce vigneron emploie neuf permanents et cinquante-six saisonniers. Ici, pas de prime de fin d’année, ni d’intéressement, mais un treizième mois et des heures supplémentaires. « Nous sommes à 35 heures. En réalité, les salariés font 37,5 heures en hiver et 42,5 en été », détaille le vigneron.
En fait, « notre gestion s’appuie sur des valeurs autres que le salaire, souligne-t-il. Le plus important à mes yeux, c’est l’accompagnement en termes de formation et le bien-être au quotidien ».
Tous les ans en septembre, chaque salarié pioche dans la liste des formations en fonction de ses besoins. Dans le même esprit, le 16 décembre, tous les salariés ont été conviés à visiter un fournisseur de composts. Une journée prise sur le temps de travail. Et, pour « pousser chacun à se responsabiliser », le chef d’exploitation mène un entretien individuel annuel avec tous ses permanents.
Concernant le bien-être, Raphaël Dubois a mis en place « des petites choses qui font du bien. Si un salarié a un rendez-vous chez un médecin en pleine journée, il n’a pas à poser une demi-journée de congé ». Autre exemple : pour un loyer modique, il a mis un studio lui appartenant à la disposition d’un saisonnier qui dormait dans son camion. Et en juillet dernier, il a carrément acheté deux mobil homes pour loger des saisonniers.
À Souzay-Champigny, dans le Maine-et-Loire, Marie-Françoise Ratron emploie trois permanents et quatre saisonniers sur 23 ha. « Ce sont les actes du quotidien qui sont importants », assure la gérante du domaine Ratron - Clos des Cordeliers. Ainsi, les salariés disposent d’une salle à manger au domaine, de bottes chaudes en hiver et peuvent cueillir les légumes du jardin. Sans oublier le repas de Noël dans un restaurant gastronomique, où le vin du domaine est à la carte, que les permanents ne zapperaient pour rien au monde.
Pour économiser sur les trajets, les employés ne travaillent qu’un vendredi sur deux, plutôt que tous les vendredis matins. Des petits riens qui s’ajoutent à la stratégie salariale mise en place par Marie-Françoise Ratron. « En termes de rémunération, personne n’est en bas de l’échelon de sa catégorie. Et les salariés ne demandent pas d’augmentation car j’anticipe », explique-t-elle.
Au 1er septembre, elle a augmenté son assistante administrative de 300 € nets car elle fait « un super boulot ». Avant cela, au printemps, elle avait augmenté son ouvrier viticole. Et son chef de culture en 2021. En fin d’année, les salariés touchent une prime équivalente à 90 heures payées sur la base du salaire de décembre. Le plan d’épargne entreprise lancé en 2015 a été, lui, mis sur pause avec le Covid. Des bons cadeaux ? « On est en retard sur le sujet », reconnaît-elle. Parmi ses projets, la vigneronne compte édifier une salle de sport avec un espace de repos pour ses salariés.
Toujours dans le Maine-et-Loire, le Château du Fresne, 75 ha à Bellevigne-en-Layon, emploie neuf salariés permanents : quatre ouvriers viticoles, deux administratifs et trois personnes à la cave. Tous sont au-dessus du Smic. Ont-ils demandé une hausse de salaire ? « Pas directement. Mais nous avons réagi à la hausse du Smic et à l’inflation », indique David Maugin, un des trois associés du domaine. En 2022, les salariés ont bénéficié de trois augmentations : la première de 3 à 4 % le 1er janvier, la deuxième en mai de 2 à 3 % et la dernière en août, de 0,5%, uniquement pour trois ouvriers viticoles.
Si de petits écarts sont observés entre les salaires des ouvriers à la vigne et le personnel administratif et de cave, cela ne génère pas de frustration.
Les employés travaillent 39 heures. Les heures supplémentaires ne sont pas payées mais récupérées en jours de congé. Ici, pas de tickets-restaurants, ni de bons cadeaux, « trop compliqués à mettre en place », estime David Maugin. En revanche, les salariés bénéficient de plusieurs primes : 90 heures payées en plus, en fin d’année, un coup de pouce qui va de 150 à 400 €, à l’automne et au printemps, en fonction du travail de chacun et des résultats de l’exploitation. Le domaine, qui réalise 75 % de son chiffre d'affaires en ventes directes, mise sur l’œnotourisme. Il organise ainsi quatre journées portes ouvertes par auxquelles les salariés participent. En contrepartie, ces derniers touchent 160 € de prime et récupèrent ces quatre journées. Autant de façons de les encourager.