st-ce une première ? « Moi-même, je n’ai vu personne d’autre le faire » esquisse le vigneron savoyard Didier Berthollier. Depuis deux ans, le domaine la Combe des Grand’Vignes (12 hectares à Chignin, en conversion bio) affiche les concentrations de sulfites mesurées à chaque mise en bouteille sur les contre-étiquettes de sa dizaine de cuvées (avec en comparaison les plafonds réglementaires des vins bio, en biodynamie et de l’Association des Vins Naturels, voir photos ci-dessous).
« Les choses sont tellement peu précises, avec des discours peu clairs sur les vins nature, que l’on décide d’annoncer les choses clairement, avec des références, pour donner les éléments à nos consommateurs » explique Didier Berthollier. Vinifiant sans ajout de sulfite jusqu’à la mise en bouteille*, « nous produisons des vins à des taux de sulfite très bas. Nous n’avons pas forcément envie de revendiquer un label, mais nous avons la volonté de valoriser nos efforts sur les sulfites : pourquoi ne pas dire clairement ce que l’on met ? » ajoute le vigneron.


Réalisée par un laboratoire avant l’embouteillage (mais sans en reprendre la marge d'erreur), chaque analyse est affichée grâce à l’habitude du domaine la Combe des Grand’Vignes d’avoir une petite étiquette additionnelle sur chaque contre-étiquette, afin de permettre des modifications selon les mises et les millésimes (grâce à une deuxième tête de pose montée sur l’étiqueteuse classique). Didier Berthollier reconnaît que cette recherche de précision et de transparence n’est sans doute pas perçue par la plupart des consommateurs : « mais ça peut les rassurer de voir que l’on a pris la peine de marquer ce que l’on a fait avec des références. Ça donne une réponse à certaines attentes. Les cavistes et sommeliers sont contents d’avoir des éléments précis pour vérifier ce qu’on leur dit. »
« J’espère que ces informations seront généralisées à l’ensemble des vins » confirme le sommelier Fabrizio Bucella (professeur à l'Inter Wine & Dine de Bruxelles), pour qui « il est faux de croire que le consommateur ne serait pas capable d’assimiler l’information. Celle-ci est d’ailleurs connue par le domaine ou le vigneron, pourquoi la garder secrète ? »
« A partir du moment où l’on travaille et que l’on fait des efforts, ça paraît normal de communiquer de manière précise » confirme Didier Berthollier, qui ne compte pas en rester là. Si la question de l’affichage des résidus phytos s’est posée par le passé, elle ne se pose plus de manière aussi « prégnante » avec la conversion bio en cours. « Désormais, pourquoi ne pas préciser la dose de cuivre à l’hectare ? » pose Didier Berthollier, qui réfléchit prochainement à l’étiquetage des quantités moyennes de cuivre pulvérisées chaque millésime (avec en parallèle les références AB et Demeter comme repères de comparaison). « On dit utiliser du cuivre, on montrera que les proportions restent faibles » souligne le vigneron, qui a réalisé 11 traitements sur le millésime 2021, pour 2 kg/ha malgré la pression mildiou forte depuis juillet.
* : Avec un sulfitage visant 10 mg/l de SO2 libre, grâce à des analyses suivant le taux de combinaison.
Aperçu de la contre-étiquette : à droite l'étiquette rajoutée et à gauche le détail des concentrations de SO2 autorisées par trois labels.