ême si, au final, il s’agit de déshabiller Pierre pour habiller Paul, cette décision représente une victoire pour le secteur des vins français, menacé d’une nouvelle surtaxe dans le cadre de la fiscalité des services numériques. L’administration américaine avait annoncé son intention, dans un rapport publié en décembre, d’appliquer des tarifs douaniers supplémentaires allant jusqu’à 100% sur certaines importations provenant de la France, dont le vin. Au final, le taux de taxation a été ramené à 25% et le vin ne figure pas sur la liste de produits ciblés. Néanmoins, dans sa décision publiée vendredi dernier, l’USTR affirme qu’il va « continuer à surveiller l’impact des sanctions commerciales et l’évolution des discussions avec la France, et pourra adopter les modifications appropriées ». Autant dire que le vin n’est pas sorti de l’auberge. D’autant plus que la taxe française n’est pas encore entrée en vigueur. Les six mois à venir seront donc déterminants, ce moratoire devant prendre fin en janvier prochain.
Pendant cette période, la politique menée par d’autres pays dans le domaine des services numériques sera passée au crible par l’administration américaine. Au total, 9 pays et l’Union européenne sont concernés, parmi lesquels l’Italie, l’Espagne et l’Autriche. Leur implication assume toute son importance quand on connaît la structure de la distribution des vins aux Etats-Unis, comme l’ont fait remarquer des professionnels américains lors d’un webinaire organisé le 6 juillet par l’US Wine Trade Alliance. « Les producteurs américains dépendent des distributeurs pour leur accès au marché », a rappelé Benjamin Aneff, président de l’Alliance. « Or, les distributeurs subissent l’impact négatif des tarifs douaniers additionnels ». Partant de là, l’importateur et distributeur Harmon Skurnik de Skurnik Wines qui représentent plus de 500 domaines aux Etats-Unis, a insisté sur la nécessité pour la filière américaine de s’impliquer dans la lutte contre ces tarifs. « Les marges sur les vins européens sont souvent plus importantes que sur les produits américains », a-t-il expliqué, soulignant les répercussions de la surtaxe sur la capacité financière des importateurs et distributeurs. Et d’ajouter : « De la même façon qu’on ne peut pas proposer aux consommateurs des choux de Bruxelles à la place d’oranges, un restaurant italien ou français ne peut pas remplacer ses vins nationaux par des produits américains ! » Dix mois après l’instauration de la surtaxe sur certains vins européens, les professionnels aux USA constatent que les consommateurs n’ont pas délaissé ces vins au profit de produits issus de pays tiers.
Néanmoins, malgré cette victoire sur le front des services numériques, il reste encore beaucoup de batailles à gagner. Non seulement l’administration américaine pourrait-il décider ultérieurement d’inclure le vin sur la liste des produits surtaxés si l’issue des négociations ne lui est pas favorable, mais le dossier Airbus est, quant à lui, loin d’être clos. Dans le cadre de l’examen périodique des surtaxes douanières y afférant, les commentaires seront reçus jusqu'au 26 juillet pour une décision attendue autour du 12 août. L’US Wine Trade Alliance fait tout son possible pour inciter les professionnels, et leur entourage, à faire part des préjudices subis, tout en insistant sur l’intérêt de ne pas mettre l’accent sur l’effet néfaste des surtaxes sur les producteurs européens : « A chaque fois qu’on insiste sur le préjudice subi par la filière européenne, ou que celle-ci demande des compensations, cela ne fait qu’apporter de l’eau au moulin de l’administration américaine… », met en garde Benjamin Aneff.