Il est encore trop tôt pour connaître l’impact des incendies sur la récolte 2020 dans les différents vignobles australiens, notamment ceux du Sud-Est du pays, les plus exposés. Si les superficies brûlées ont été recensées – en janvier les organismes professionnels évoquaient au maximum 1% de la superficie totale du vignoble, soit 1 500 ha – l’étendue du goût de fumée est en cours d’analyse. Les différents organismes professionnels, dont l’institut de recherche AWRI et Wine Australia, proposent actuellement à l’ensemble des vignerons concernés des analyses pour déterminer l’effet des immenses nuages de fumée sur les raisins. Certains vignerons, comme Graeme Shaw de Shaw Wines dans la région de Murrumbateman en Nouvelle Galles du Sud, ont d’ores et déjà décidé de ne pas récolter cette année, préférant laisser ses moutons se régaler des raisins coupés pour cause de goût de fumée prononcé : « pour le cabernet, c’est comme si on léchait un cendrier », a-t-il déclaré dans les médias australiens. Au-delà de l’impact direct des incendies sur les vignobles et les vins, le secteur touristique subit des pertes importantes, faute de visiteurs.
Mais depuis cette immense catastrophe naturelle, un désastre d’un autre genre se profile et inquiète sérieusement les vignerons et exportateurs australiens. Les mesures prises par les autorités chinoises pour tenter de contenir le coronavirus vont, en effet, mettre à mal les efforts réalisés depuis plusieurs années pour développer le marché chinois des vins. Rappelons qu’en 2019, l’Australie a exporté vers la Chine des vins d’une valeur de 1,28 milliard AUD (soit environ 780 millions d’euros), en progression de 12% par rapport à l’année précédente. La Chine (avec Hong Kong et Macau) représente, et de loin, le premier marché export des vins australiens en valeur. Même si Wine Australia n’a pas encore recensé les pertes, les médias australiens font état d’une chute de 90% des ventes en Chine subie par certains exportateurs au cours des deux premiers mois de cette année. Le géant Treasury Wine Estates vient de réviser ses perspectives de croissance à la baisse à cause de l’épidémie. Outre le fait que les restaurants, bars et boîtes de nuit restent, soit fermés soit vides, et que de grandes manifestations professionnelles, comme la China Food and Drinks Fair à Chengdu, ont été annulées, le contexte n’est guère propice aux dépenses sur des produits non essentiels, sans compter l’impact sur le tourisme. Globalement, les touristes chinois génèrent un chiffre d’affaires annuel de quelque 20 milliards AUD (soit environ 12 milliards d’euros) au bénéfice de l’économie australienne, les événements et découvertes du vignoble figurant en bonne place dans les destinations touristiques. Mais au final, ce qui se passe de l’autre côté de la planète n’est peut-être qu’un avant-goût de ce qui nous attend en Europe.