Tous les critiques sont justes. Il ne reste qu'à les comprendre » écrivait, en fin connaisseur, Jean Paulhan. Pour un titre de presse comme Vitisphere susciter le débat sur un sujet clé d’actualité est une fin en soi. Sans être une étape obligée, ou recherchée, être critiqué par les tenants des positions diamétralement opposées est souvent inévitable.
En témoignent les réactions ayant suivi le récent article suivant la publication d’un bulletin d’analyses des résidus phytos d’un vin de la cave coopérative de Tutiac. Dans leur rôle, les associations anti-phytos ont critiqué « un article au titre prometteur » minimisant la portée de leurs « révélations ». Plus inattendus, des retours de vignerons et fournisseurs estiment que notre rédaction donne trop de poids aux initiatives des anti-phytos. Certes, il serait plus attendu pour notre rédaction, et plus confortable pour nos lecteurs, de ne pas chercher à recueillir et analyser les arguments de « l’autre bord ». Cultiver l’entre-soi permet d’éviter les remises en question radicales, mais brouille la perception de ce qui se trame en dehors de son camp. Surtout retranché.
Si l’on entend encore râler dans le vignoble contre des orientations politiques aux fondements moins scientifiques que médiatiques (comme l’interdiction du glyphosate, l’intégration de mesures agroenvironnementales dans les cahiers des charges des indications géographiques, l’obligation de chartes de voisinage…), il faut bien noter que les opérateurs les plus à l’écoute des marchés ont pris des engagements anticipant et dépassant la réglementation (interdiction de tous les herbicides, certification environnementale obligatoire, absence de résidus…). Ces entreprises ont conscience des injonctions de transparence et d’exemplarité qui façonnent notre société moderne. Le client est roi. Qu'on l'accepte ou non.
En ce sens, les antiphytos sont des aiguillons, que l’on peut critiquer pour leurs excès (notamment leur intransigeance face à toute viticulture alternative qui ne soit pas bio), mais qu’il est nécessaire d’écouter (notamment à l’heure des réseaux sociaux). L’amélioration des pratiques est un impératif pour tous, tous en conviennent : le débat reste ouvert sur les solutions à déployer. La sourde oreille n'en fait pas partie.