Wait and see ». On ne peut plus anglaise, la fataliste expression exhortation à la patience (« attendez et voyez ») revient sur toutes lèvres, et tous tons, si vous évoquez les impacts du Brexit avec des ressortissants du Commonwealth au salon Prowein. Derrière de nombreux stands, allant de l’Afrique du Sud à la Nouvelle-Zélande, en passant par l’Australie et le Canada, les exposants ont généralement l’idée que la sortie du Royaume-Uni de la Communauté Européenne n’aura pas un grand impact sur leurs ventes. Ce qui n’empêche pas les espoirs de tirer parti de cette désunion européenne.
« Nous espérons bien que le Brexit ce sera une opportunité ! » s’exclame Maryna Calow, la responsable de la communication des Vins d’Afrique du Sud (WOSA). Se montrant résolument optimiste, elle envisage la possibilité « qu’en réaction du Brexit, le Royaume-Uni se désengage des produits européens ». Pour ajouter à ses espoirs, Maryna Calow rapporte des « indications qu’en cas de sortie sans accord (le no-deal), nos vins seraient importés sans droits de douane, ce serait fantastique ! »
Plus mesurée, Marie O’Riordan, la directrice des marchés européens pour les domaines néo-zélandais Seifried reconnaît que « potentiellement, le Brexit pourrait être une opportunité pour les vins néo-zélandais. Qui bénéficient déjà d’un marché anglais très dynamique. Mais personne ne sait actuellement ce qui va se passer… Et surtout par le gouvernement. » Il est vrai qu’alors que la date d’entrée en vigueur du Brexit approche (étant fixée ce 29 mars), les modalités de la rupture restent inconnues (avec ou sans un accord, avec ou sans report…). Avec ces incertitudes sur leurs possibilités d’approvisionnements après le Brexit, les importateurs et distributeurs anglais ont surstocké souligne Marie O’Riordan, ce qui laisse prévoir un inévitable contrecoup sur le marché anglais, quelle que soit l’issue du Brexit.


Encore plus mesuré, Andreas Clark, le PDG des Vins d’Australie (Wine Australia) est loin de faire le moindre plan sur la comète. « Le Brexit ? Qui en sait quoi que ce soit actuellement ? Ce n’est que de la spéculation. Que ce soit sur les évolutions des tarifs douaniers, de l’impact sur l’économie et la consommation de vins… » balaie-t-il.
Légèrement pessimiste, John W. Skinner, le vigneron canadien de Painted Rock Estate Winery (Colombie Britannique) se souvient avoir démarché le Royaume-Uni « pour avoir un représentant qui puisse me donner accès à tout le marché européen. Être présent sur le marché anglais était une entrée. Mais je n’en suis plus sûr désormais. Et j’ai pris des agents en France, en Allemagne, au Danemark… » indique-t-il. Si le Royaume-Uni peut perdre son statut de plaque tournante du marché mondial du vin, « il faudra rester présent dans le réseau anglais pour être visible et pouvoir être noté par les critiques les plus influents. Avoir une bonne note de Jancis Robinson ou Steven Spurrier vous permettra de vendre à Dubaï » conclut John W. Skinner. Témoignant que même davantage isolé, le Royaume-Uni continuera d’avoir une influence mondiale. Et pas seulement sur ses anciennes colonies.