Ça fait 25 ans que les viticulteurs du secteur observent la progression de la salinisation de nos terres. Sans que nous ayons modifié nos pratiques culturales, on constate que le périmètre concerné s’accroît. Il concerne désormais 3 200 ha dont 1 500 ha de vigne. La première année, on note une perte de rendement, la deuxième année, la vigne commence à perdre ses feuilles et la troisième année, la souche meurt. Nous avons des pertes déjà mesurables dans certaines exploitations. Pour notre coopérative, la perte pourrait atteindre jusqu’à 28 % de notre chiffre d’affaires à court terme et jusqu’à 58 % à l’horizon 2030 ». Ce vendredi 6 octobre à Sérignan, devant un parterre garni d’élus (sénateur, député, conseiller régional, conseiller départemental…) et en présence du sous-préfet de Béziers, Arnaud Lupia, président de la cave coopérative de Sérignan, a dressé un constat alarmant sur les remontées de sel qui s’étendent chaque année sur les communes de l’embouchure de l’Orb au sud de Béziers : Sérignan, Cers, Portiragne, Sauvian et Villeneuve les Béziers. En cause : en premier lieu le réchauffement climatique, responsable du déficit en eau douce sur le territoire. Mais, Arnaud Lupia a également pointé la forte évolution des prélèvements dans l’Orb qui ont augmenté de 50 % sur la période 1987-2010. « Le débit moyen de l’Orb qui se situait entre 8 et 10 m3/s dans les années soixante-dix est tombé à 2-3 m3/s aujourd’hui », affirme-t-il.
Une étude commencée en 2015 avec l’appui de la Chambre d’Agriculture et le financement des collectivités locales préconise la mise en œuvre concomitamment de plusieurs actions pour enrayer le phénomène.
- L’évacuation de l’eau salée par un réseau de drainage qui passe par la remise en état ou la création de réseaux de fossés.
- Le développement de l’enherbement et du travail du sol pour favoriser l’infiltration de l’eau douce.
- La submersion de ces terres en période hivernale. Aujourd’hui la submersion est réalisée sur 300 ha, il faudrait augmenter cette surface à 1 000 ha, soit en installant des bornes d’irrigation soit en réalisant des pompages dans l’Orb. Mais Laurent Bouchet, ingénieur agronome de la société Envilys qui a réalisé l’étude, souligne que la période durant laquelle il est possible de pomper de l’eau douce dans l’Orb est de plus en plus limitée. L’installation de barrage anti-sel pour repousser l’horizon salé pourrait résoudre cet écueil.
Les solutions techniques existent donc, mais le travail le plus conséquent est certainement à venir : la mise en œuvre de ces solutions nécessite une concertation de tous les acteurs du territoire sur la gestion de la ressource en eau. Reste également à trouver les financements. « « On va aller les chercher », a promis Jean Noël Badenas, président du SMVOL (Syndicat mixte des vallées de l’Orb et du Libron), qui a pour mission la gestion équilibrée et durable de la ressource dans ce secteur. Pour Arnaud Lupia, ce soutien tout comme la présence de cet aréopage d’élus laisse à penser que le dossier est plutôt bien engagé.