L'important déficit de pluviométrie enregistré pendant l'hiver et au printemps dans le Sud-Est commence à se faire sentir dans les vignobles, à commencer par la Provence, où la situation de sécheresse est la plus avancée. L'ensemble du Var a par exemple connu en 2016 un cumul de pluies largement inférieur aux quantités habituelles. Entre janvier et mai 2017, le cumul de pluie a été de -40 % par rapport à la moyenne décennale. Dans l'appellation Côtes-de-Provence, le bilan hydrique y est donc dans l'ensemble déficitaire sur la majorité des stations météo. Résultat des courses : dans les secteurs de la Sainte-Victoire, de la plaine des Maures, autour de Fréjus et de La Londe les Maures, des symptômes de stress hydrique sont déjà constatés, qui se traduisent par un jaunissement du feuillage, qui peut aller jusqu'à une défoliation et des arrêts de croissance.


« Cela fait trois ans de suite qu'il y a un bilan hydrique négatif et un stress important dans les secteurs concernés », remarque Alicia Berret, technicienne de l'ODG. Plus globalement, celle-ci constate ces dernières années de moins en moins de pluies au printemps, accompagnées de températures de plus en plus douces, impliquant au fil du temps « une avancée de la date de débourrement et une croissance végétative plus importante et précoce de la vigne ». « La plante stresse plus rapidement et plus précocement qu'avant, car elle a besoin d'eau plus tôt… Or il pleut de moins en moins… », témoigne celle-ci. Une demande de dérogation pour pouvoir irriguer a donc dû de nouveau être déposée le 16 juin par l'ODG, que l'Inao a aussitôt acceptée.
Plus au nord, dans la vallée du Rhône, le scenario risque d'être identique d'ici quelques semaines, voire quelques jours, s'il ne pleut pas ou peu d'ici là : « Le bilan hydrique est nettement inférieur aux normales. Le risque d’un stress hydrique fort pour cet été est élevé », indiquait le dernier bulletin technique de la chambre d'agriculture. « Il y a un risque de sécheresse pour la vigne si juillet reste sec », confirme Thomas Gauthier, conseiller Chambre d'agriculture de la Drôme. La pluviométrie a en effet été forte en octobre et novembre mais de janvier à juin 2017, un gros déficit cumulé, de 62 % par rapport à la normale, a été enregistré. Les températures sont par ailleurs supérieures aux normales de saison. La Drôme a d'ailleurs été classée en "vigilance sécheresse" depuis mai et le Vaucluse le 16 juin dernier. Le Gard pourrait suivre.


Mais jusqu'à présent, les vignes semblent tenir le coup et ne présentent pas ou peu de symptômes visibles : « On est en situation de gros déficit hydrique mais qui ne se traduit pas encore en stress hydrique, commente Françoise Dijon, œnologue à l'Institut Rhodanien. On est limite…On va rentrer dans une période critique ». Dans la partie septentrionale, même constat : « On s'attend à une sécheresse cet été, mais pour le moment, il n'y a pas d'arrêt de croissance observé : les vignes ont encore accès à l'eau, les réserves ne sont pas encore tout à fait épuisées », témoigne Clément Panigaï, du Syndicat des vignerons. Ce dernier a tout de même déposé une demande d'autorisation d'irriguer le 23 juin dernier pour les appellations régionales et villages, à une date plus tôt que d'habitude. Les appellations Châteauneuf-du-Pape et Vacqueyras ont fait de même.
Les prochaines semaines vont donc être déterminantes pour la suite concernant l'évolution des vignes, les viticulteurs - surtout ceux qui ne peuvent pas irriguer - attendant avec impatience le retour de « quelques pluies bienfaitrices ». Les orages qui ont justement éclaté ces jours-ci pourraient permettre d'inverser cette tendance.