ans un contexte viticole de réduction des vigueurs et d’adaptation au changement climatique, la palette du matériel végétal ne se limite pas aux greffons. « Les porte-greffes sont des éléments d’ajustement par rapport à des éléments biotiques et abiotiques » pose Nathalie Ollat (Institut National de la Recherche Agronomique). Captivant l’audience du congrès de la Fédération Française de la Pépinière Viticole, ce 19 octobre à Bordeaux, la chercheuse a détaillé les axes du programme Idéogreffe.
La construction d’un programme de sélection a particulièrement intéressé les pépiniéristes, avec son objectif de créer de nouveaux porte-greffes adaptés à des contraintes spécifiques (chlorose, stress hydrique…). Mais « il ne faut pas s’attendre à des résultats rapides » alerte Nathalie Ollat. Si cette dynamique de recherche a été relancée en 2000, le rétroplanning de sélection ne prévoit pas d’amener de nouvelles obtentions au stade de test des Valeurs Agronomiques, Technologiques et Environnementales avant 15 ans.
Pour accélérer le processus de sélection, il est nécessaire de moderniser les outils à disposition, qui restent proches de ceux de la fin du XIXe siècle, dont est issu l’essentiel des porte-greffe actuels. « Il faut mieux connaître les déterminants génétiques des porte-greffe en développant des marqueurs moléculaires » estime Nathalie Ollat. Parmi les critères basiques qui permettraient de filtrer les sélections, la résistance à phylloxéra et la bonne capacité de greffage sont évoquées.
De premiers résultats prometteurs ont été trouvés pour la résistance aux nématodes de type Xiphinema index. D’après les analyses d’ADN, trois gènes sur trois chromosomes ont été identifiés comme responsable de ce caractère. Ce qui permettrait de trier d’emblée les individus contrôlant le nématode. De même, la capacité d’enracinement serait localisée sur un chromosome. Mais ces marqueurs de sélection génétique ne peuvent pas être généralisés, restant spécifiques aux variétés utilisées. Et dépendent donc des croisements réalisés. L’INRA travaille ainsi sur un croisement Vitis berlandieri x Vitis rupestris, qui nécessite le développement de ses propres marqueurs.
Dans le catalogue français, on trouve actuellement 31 porte-greffes. « C’est une diversité peu utilisée, à eux seuls, les trois premiers porte-greffes représentent 55 % des surfaces nationales* » souligne Nathalie Ollat, qui estime que la diversité existante a été oubliée. Le deuxième volet du programme Idéogreffe doit justement diversifier l’usage des porte-greffes à partir de l’existant. Ce qui passe par une réactualisation des connaissances. Des dispositifs expérimentaux ont été lancés afin de récolter de nouvelles observations.
Comme le programme Greffadapt, avec la plantation de 55 porte-greffes (dont 25 étrangers) dans le vignoble expérimental de la Grande Ferrade (pour 4 125 souches suivies, sachant qu’il y a 5 greffons testés). Ont également été mis en serre 47 porte-greffes en pot, pour suivre leurs réponses à une contrainte hydrique contrôlée. Un réseau de parcelles est également en construction à l’échelle bordelaise. Là-aussi, les résultats demanderont de la patience.
* : Il s’agit du SO4 (24 % des surfaces), du 110 Richter (17 %), du 3 309 Couders (14 %). Viennent ensuite le 41 B de Millardet et Grasset (10 %) et le 140 Ruggieri (7 %).