Le changement climatique a déjà des effets dans le vignoble français. Dans la plupart des régions, il est plutôt vu comme une opportunité, permettant d’obtenir une meilleure maturité des raisins et de ne plus chaptaliser » rapporte Nathalie Ollat, ingénieur de recherche à l’Institut National de la Recherche Agronomique (UMR Ecophysiologie et Génomique Fonctionnelle de la Vigne de Bordeaux). « Mais les professionnels se doutent que ce qui est positif aujourd’hui, peut devenir négatif demain. Par exemple, il semble que l’oïdium devienne plus étendu et sévère dans le nord de la France » nuance-t-elle.


Entre opportunités et risques, les effets viticoles du changement climatique sont par essence complexes. Et seront au coeur du symposium bordelais ClimWine, qui se tiendra du 10 au 13 avril à Bordeaux (à Cap Sciences, le long des quais). « Il y aura quelques solutions d’adaptations proposées, mais le symposium est essentiellement dédié à des échanges de résultats entre scientifiques » prévient Nathalie Ollat. En témoigne un programme de colloque chargé, qui plus est mené en anglais (ambition internationale oblige).
Cette conférence conclut officiellement les quatre années du réseau Laccave (2012-2015), qui aura fait plancher 23 laboratoires de l’INRA sur la question prospective du vignoble français en 2050. « Avec un projet aussi large, il est difficile de sortir un résultat majeur, mais il y a quatre aspects notables » résume Nathalie Ollat, qui a piloté ce projet national et espère voir naître un nouveau réseau de recherche sur ce thème.
Parmi les résultats du réseau Laccave, Nathalie Ollat souligne que « les travaux de mesure et de modélisation du climat à l’échelle locale ont montré sa grande variabilité. Du même ordre de grandeur que des différences entre millésimes et régions ». Ce qui dessine une richesse de situations et doit faire envisager des adaptations à petite échelle.
Les chercheurs se sont également penchés sur la caractérisation du matériel végétal en collection.. L’un des enjeux étant l’identification des caractères clés dans l’adaptation au changement climatique (concentration en sucre, composés aromatique, résistance à la sécheresse…). « On ne peut pas dire s’il faut planter tel ou tel cépage, mais on a appris à mieux étudier la variété des cépages à disposition » estime Nathalie Ollat.
D’autres laboratoires ont analysé l’acceptation par les consommateurs de vins marqués par une hausse des températures. Si les panels de dégustateurs ont d’abord été sensibles au plaisir de vins mûrs et concentrés, ils s’en sont vite lassés. Ce qui laisse entendre que l’acte d’achats ne serait pas durable pour de telles gammes.
Toujours en cours, l’étude prospective à horizon 2050 doit permettre de proposer des scénarios d’adaptation extrêmes qui devront permettre à la filière viticole de mûrir sa réflexion sur le long terme. « Le vignoble s’est emparé très tôt du sujet, avec des bilans carbone et des plans de développement durable » salue Nathalie Ollat, qui l’appelle désormais à s’emparer du sujet pour mieux s’y adapter.
Mais pour l’instant, le vignoble semble moins préoccupé par le changement climatique que par des enjeux sanitaires (qu’il s’agisse de réduire sa consommation de phyto ou lutter contre les maladies de dépérissement). Le symposium ClimWine doit ainsi servir de lieu d’échanges entre scientifiques, avant qu’ils ne prennent leur bâton de pèlerin pour informer et alerter sur les effets du changement climatique.