a première matinée du Lallemand Tour a réuni près de 150 participants, à Nîmes, le 19 janvier. En introduction, Anthony Silvano, responsable du développement technique et des applications de la firme, a rappelé combien les sensations tactiles du vin sont un sujet sous-exploitées. Parmi elles, il en est une qui donne du fil à retordre aux chercheurs : l'astringence. Nécessaire à l'équilibre d'un vin, elle est pourtant « rejetée par la majorité des consommateurs », comme l'a rappelé Barry Dick, Master of Wine 2013.
Alors Julie Mékoué, chargée R&D pour Lallemand, a expliqué à l'audience ses origines. « On sait que les sels de cations, l'alcool, les acides organiques et les tanins interagissent avec les protéines salivaires et les cellules buccales. Ces interactions font baisser le pouvoir lubrifiant de la salive. En plus, les précipités tanins-protéines salivaires donnent la sensation de particules en bouche ». Au final, le dégustateur ressent un rétrécissement ou un étirement de la muqueuse buccale. C'est l'astringence.
Pas moins de 4 types de protéines salivaires, aux comportements différents, entrent en jeu. Les plus abondantes, les « PRP » (protéines riches en proline), précipitent avec les tanins condensés, alors que les mucines restent solubles, même liées aux tanins. Et pour ne rien faciliter, tous les tanins n'ont pas les mêmes propriétés de combinaison avec les protéines salivaires. Résultat, « le mécanisme de l'astringence n'est toujours pas complètement élucidé ». Tout comme l'impact exact de la composition du vin.
Pour l'heure, il semble acquis que plus le vin contient de tanins et que plus ceux-ci sont polymérisés et galloylés (estérifiés par l'acide gallique), plus il est astringent. A contrario, l'astringence diminue avec l'élévation de la température, des teneurs en polysaccharides, en alcool, en sucre, et avec l'augmentation du pH.
En fin de matinée, Fernando Zamora, professeur et chercheur à l'université de Taragone a cherché à fournir à l'assemblée quelques pistes pour réduire l'astringence. Il a présenté des résultats d'essais réalisés par son équipe en 2012 sur cabernet sauvignon. Les chercheurs ont fait varier la date de récolte et la durée de cuvaison, de une à quatre semaines. « On peut tout à fait laisser macérer ses vins longtemps, à condition que l'on ait rentré des raisins bien mûrs », a-t-il expliqué. La macération préfermentaire à froid est également intéressante. « Elle augmente la teneur totale en tanins du vin mais abaisse le pourcentage de tanins galloylés ». Enfin, les ajouts de levures sèches inactives font baisser le degré moyen de polymérisation et la sensation d'astringence.
Preuve, s'il en fallait une, de l'étendue et de la complexité du sujet, les intervenants ont passé un long moment à tenter de répondre aux questions du public en fin de matinée.