our dévoiler son programme de création et de sélection variétale, la maison Martell a opportunément choisi l’assemblée de l’Union des Viticulteurs Producteurs de Cognac (la SICA UVPC), qui réunissaient ses adhérents/livreurs ce 7 décembre. Le négoce tricentenaire se place ainsi aux côtés de la viticulture, et de ses challenges d’avenir : les adaptations aux changements climatiques et la nécessité de réduire les intrants (notamment phytopharmaceutiques).
« Nous ne cherchons pas à nous substituer à qui que ce soit, nous essayons d’apporter notre pierre à l’édifice » précise Pierre Joncourt, le directeur des opérations de la maison Martell. Si la Station Viticole de Cognac concentre ses recherches sur les variétés à résistance polygénique semblables à l’ugni blanc (via rétrocroisements), l’idée de Martell est au contraire de s’éloigner du premier cépage charentais (qui représente 95 % de l’AOC Cognac). Estimant que plus l’on a de cartes en main, plus l’on est à même de s’adapter à une partie serrée, la maison Martel élargit ainsi le spectre de recherche en prônant le joker de la diversité.
« Nous n’avons pas la prétention d’avoir seuls les capacités de résoudre ces problèmes » ajoute Pierre Joncourt. Le projet fédère ainsi les expertises de l’INRA de Colmar, de l’INRA et de l’IFV de Montpellier, ainsi que de la Station Viticole et du Conservatoire du Vignoble Charentais. D’après le calendrier prévisionnel, les premiers individus devraient être obtenus ces quatre prochaines années, les étapes de sélections seront achevées dans 7-8 ans et les inscriptions seront envisageables dans 20-25 ans.
S’inscrivant dans l’histoire du Cognac, le financement de la recherche viticole par les maisons remonte à la crise phylloxérique, qui avait sonné une mobilisation générale. L’an dernier, Hennessy a marqué les esprits avec son appel à projet de recherche triennal contre les maladies du bois doté d'un budget de 600 000 €.
Ne souhaitant pas dévoiler son enveloppe, la maison Martell se distingue désormais avec un projet sur le très long court en recherche variétale. Dans les deux cas, le but affiché des négociants charentais reste le maintien du potentiel de production, nerf de la guerre de l'approvisionnement des marchés export.
Ce programme de R&D repose également sur un deuxième volet, de plus court terme. Il s’agit de la conclusion de travaux expérimentaux menés sur l’hybride Vidal 256 (obtenu au début du XXème siècle d’un croisement d’ugni blanc et de Seibel 4986). Si ce cépage est précoce et n’est pas encore inscrit au catalogue officiel (la procédure doit aboutir en 2019), ce cépage présente des résistances intéressantes au mildiou et à l’oïdium, ainsi que des aptitudes à la distillation (vérifiées sur eaux-de-vie). « Il s’agit désormais de savoir si ses résistances sont polygéniques ou monogéniques » résume Christophe Valtaud, le responsable du domaine Jean Martell. Une fois connues, ces résistances pourraient être intégrées au processus d’obtention variétale de Martell.