rosophila Suzukïi, et Scaphoideus titanus, insectes du XXIème siècle, petites loges d’hier et grandes cités de demain, bible et citations sont les invités des vendanges 2014.
Catherine Bernard
Drosophila Suzukïi est l’invitée de ces vendanges. Il semble qu’elle ait d’abord été repérée en Suisse dans le Valaisan où le site romanduvin décrit le 18 septembre l’insecte et son mode opératoire : « Une petite mouche d’origine japonaise introduite sur le continent européen au début du 21e siècle. Adepte des fruits rouges, elle pond ses larves dans les cerises, les framboises, les myrtilles et les raisins. Comme ses congénères européennes, elle tend à inoculer des bactéries acétiques, qui transforment le moût en vinaigre, dans les grappes qu’elle cible. Principale problème, la Suzuki dispose d’un ovipositeur, un dard qui permet de percer la peau des raisins sains pour pondre, alors que les mouchettes locales doivent attendre qu’un élément extérieur transperce la peau du raisin (guêpes, grêle) pour qu’elles puissent passer à l’action ». Puis le magazine La Vigne la repère en Alsace et dans le sud-ouest. « Cette année, la pourriture acide est présente un peu partout dans le vignoble bordelais, en particulier dans le Libournais. Et les rouges sont touchés, ce qui est rare. Toujours selon La Vigne, « la Draaf-Sral Aquitaine a rédigé une note d’information et lancé une enquête en ligne pour mieux cerner l’ampleur du phénomène ». On la repère enfin en Bourgogne où Bourgogne Aujourd’hui observe, photo de la bête à l’appui, que « c'est le sujet qui fait causer depuis quelques semaines en Bourgogne, mais aussi dans le Beaujolais alors que les vendanges se poursuivent ». Christophe Tupinier souligne : « La lutte biologique est une voie à explorer prioritairement pour régler le fond du problème (…) Elle repose sur l'utilisation d'organismes vivants appelés auxiliaires, ou des molécules dérivées de ces organismes, pour lutter contre des espèces nuisibles. Parmi ces auxiliaires, les guêpes endoparasitoïdes (qui pondent dans un autre insecte, s'y développent et entraînent sa mort), sont généralement très spécialisées vis à vis de leur hôte, limitant d'éventuels impacts sur des espèces non-cibles ». Selon Vitisphere, la prophylaxie était cette année le meilleur moyen de lutter contre drosophila suzukï : « A cette proximité de la vendange, on peut difficilement imaginer une lutte phyto contre ces insectes » estime Dominique Blancard. Se trouvant démunis face aux attaques de Drosophila suzukii, les vignerons doivent souvent se contenter de retirer des parcelles les grappes infectées ». On trouve aussi sur le site bioactualité.ch un inventaire des mesures à prendre. Tel le nuage de Tchernobyl, suzukïi aurait-elle miraculeusement épargné le Languedoc ?
La cicadelle de la flavescence dorée est l’autre fléau de ce début du XXI ème siècle. « Se mettant au diapason des vignerons français, les élus de l'Assemblée des Régions Européennes Viticoles (AREV) considèrent que la flavescence dorée « constitue un risque majeur pour le maintien de la viticulture européenne », rapporte Vitisphere. Alexandre Abellan précise que « se tenait à Marseille ce 22 septembre, la première réunion du groupe de travail à vocation à interpeller la Commission Européenne ». Article auquel un certain Robert G répondait : « Enfin, c'est bien le mot! On va avoir réussi à combiner les ravages de la flavescence, des maladies du bois et maintenant des mouches grâce à l'ouverture des frontières et il n'y a toujours pas eu de grande mobilisation supranationale pour lutter contre ces nouveaux phylloxeras... C'est enrageant! » Il semble en effet que Scaphoideus titanus ignore les frontières. Selon France Bleu Vaucluse, « la maladie se propage au Vaucluse ». Dans le Jura, « une première », relève La Vigne, « le syndicat des viticulteurs organise pendant quatre jours une prospection de tout le vignoble à la recherche de plants atteints de flavescence dorée ». De même à Gaillac, selon le Tarn Libre.
Loges et cités
Romy Ducolombie se livre cette semaine dans Le Figaro à une synthèse d’un autre phénomène, celui des cités du vin, qu’elle qualifie de « nouveaux panthéons de la vigne ». « Aux quatre coins du vignoble, des structures hors normes dédiées à la dégustation du vin et à la présentation d’une région viticole émergent », commence-t-elle. Il y a d’abord l’incontournable « Cité des Civilisations du vin de Bordeaux », « bâtiment de 14 000 m² et de 55 mètres de haut », qui « ambitionne de devenir un véritable "lieu de vie" du vin capable de capter 500 000 visiteurs par an ». Il y a aussi « la Cité des Vins de Bourgogne à Beaune ». « La cité mère sera installée à Beaune mais deux satellites, ses cités filles verront le jour à Chablis et Mâcon ». L’ambition est plus modeste : 90 000 visiteurs l’an. Il y a enfin, côté Rhône, « Le Carré du Palais, attendu pour juin 2015, qui prendra ses quartiers dans l’ex-Banque de France de la ville ». La journaliste conclut : « Nouveaux phares d’une région viticole, ces cités du vin en pleine construction ont bien compris l’importance stratégique de l’oenotourisme pour l’économie d’une région. Portes d’entrée d’un univers du vin qui a soif de proximité ! » Plus modestes, les Ligériens invitent eux l’oenotouriste « à la découverte de quarante loges de vignes ». Ce parcours est proposé par « la Confrérie des culs d’ours », précise la Nouvelle République. C’est « une boucle de 7 km, ponctuée de plus de quarante de ces petits bâtiments. Entre maisons individuelles, paysages ruraux et zone commerciale, elles présentent un état de conservation divers : certaines sont pratiquement ruinées et dévorées par la végétation, mais d'autres ont été soigneusement restaurées. « Ce patrimoine architectural et ethnographique est un vecteur d'identité, un héritage historique à conserver et à transmettre, estime le président de l'association, Gilbert Guitard. C'est aussi une ressource à valoriser à des fins touristiques et économiques car il contribue à l'attractivité globale du territoire. »
Religiosité
A côté de la sommelière de l’année, les vendanges et les sélections des foires aux vins, la chaîne LCI pose ses caméras sur le « vin de la bible » qu’un « un chercheur israélien tente de recréer ». « Pendant trois ans, des étudiants ont ainsi arpenté Israël à la recherche de grappes sauvages. Problème : lors de la domination musulmane de la région, l'alcool a été interdit pendant plusieurs siècles. De nombreuses variétés de raisins ont alors disparu. L'équipe de Elyashiv Drori a néanmoins mis la main sur une centaine de variétés différentes, dont une dizaine peuvent servir à fabriquer du vin. Elyashiv Drori va maintenant les comparer à de vieilles grappes fossilisées retrouvées lors de fouilles archéologiques. Son but n'est pas seulement historique. Il entend bien commercialiser un cru "biblique"». L’article ne dit pas ce qu’en pensent les Palestiniens. Pour se remettre dans le contexte de l’époque, le site protestant vaudois dresse un petit inventaire du vin dans la bible, cité « plus de deux cents fois ». « Associé au blé, le raisin symbolise la fertilité de la terre promise. Le travail du vigneron évoque un Dieu qui prend soin de nous comme de sa vigne, mais aussi un homme qui prend soin de sa vie pour être heureux ». L’histoire commence avec Noe, se poursuit avec les noces de Cana, la Cène, et survit dans les proverbes. C’est d’ailleurs par une citation éphémère que La feuille de vigne accueille l’internaute, nettement moins intempestif qu’une pub dont on clique vainement sur la croix pour la quitter. Cette semaine, Oscar Wilde : « Il y a trois choses que je ne supporte pas : le café brûlant, le champagne tiède et les femmes froides ».