La France fait de la suspension des noms de domaine .vin et .wine une condition de sa participation au processus de réforme de l’ICANN [l'organisme intergouvernemental de gestion des noms de domaines web] » vient d'annoncer Axelle Lemaire, la secrétaire d'Etat au Numérique. Transformant le cinquantième sommet de l'ICANN en tribune de la dernière chance, cette prise de position gouvernementale pourrait relancer une bataille alors que la guerre semblait déjà perdue. Malgré les protestations d'Europe comme d'Amérique du Sud, l'ICANN avait acté que la délégation des extensions internet en « .vin » et « .wine » se ferait sans condition, notamment de protection des indications géographiques, ce qui fait peser le risque d'une mise aux enchères virant à un vaste racket. Egalement présente au sommet londonien, la Confédération Nationale des producteurs de vins et eaux de vie de vin à Appellations d'Origine Contrôlées (CNAOC) attend pour sa part les conclusions que l'ICANN tirera ce jeudi. Si ses revendications de protections des IG ne sont pas entendues, l'organisation a déjà annoncé son intention d'appeler au boycott des nouveaux sites et de demander à l'Union Européenne de mettre en place une plate-forme de blocage des sites violant la réglementation communautaire. La demande française de gel du processus de délégation souligne plus généralement le constat « d'insuffisances dans le cadre actuel du modèle de l’ICANN et de sa gouvernance », comme le déplorait récemment le ministre du redressement productif et du numérique Arnaud Montebourg.
Mise à jour du 27 juin : au terme de son sommet, l'ICANN n'est arrivé à aucun accord pour poser des conditions préalables à la délégation des sites en .vin et .wine. Un état de fait critiqué par la CNAOC, qui déplore « qu’un organisme à vocation technique puisse décider que les règles qui s’appliqueront sur Internet seront différentes de celles décidées par des Etats souverains ». Le sujet est désormais clairement rentré sur le terrain politique, comme le montre l'interpellation du gouvernement par des élus de régions viticoles (le député Philippe Armand Martin (Marne), le sénateur François Patriat (Côte d’Or), la députée Catherine Quéré (députée de Charente-Maritime), le sénateur Gérard César (Gironde), le député Alain Suguenot (Côte d’Or) et l'incontournable, président de la région Champagne Ardenne, Jean-Paul Bachy) Rencontrant ce jour les représentants de la filière vin (au sujet du plan stratégique de filière), Stéphane Le Foll, ministre de l'Agriculture et porte-parole du gouvernement, a annoncé envisager « toutes les mesures et actions propres à assurer aux producteurs de vins d’appellation d’origine comme aux consommateurs la protection indispensable contre les abus sur internet », aux échelles françaises et européennes.
[Illustration : Mafalda, par le dessinateur argentin Quino]