ossier brûlant dans la filière française du vin, le refus du vigneron Emmanuel Giboulot de se conformer au plan de lutte obligatoire de la flavescence dorée en Bourgogne a relancé l'ancien amalgame fait entre viticulteurs bio et irresponsabilité dans la rigueur des traitements. Avec leur plaquette rappelant les modalités de la lutte contre la flavescence dorée en bio, l'ingénieur Nicolas Constant (SudVinBio) et le conseiller Josquin Lernould (Chambre d'Agriculture de l'Hérault) arrivent à point nommé pour rappeler que les vignerons bio ne se dispensent ni de traitements, ni de réflexion en la matière. Pour lutter contre cette maladie de quarantaine majeure (la moitié du vignoble français était placé en Périmètre de Lutte Obligatoire l'an dernier), ils rappellent les trois piliers de la lutte : la plantation de ceps garantis sains (ce qui mobilise actuellement les pépiniéristes), l'assainissement du vignoble (prospection fréquente, arrachage des souches contaminées...) et surtout la maîtrise du vecteur du phytoplasme de la flavescence dorée : Scaphoideus titanus.
En conduite biologique, cette gestion des populations passe par les mesures prophylactiques (cependant « largement insuffisantes pour maîtriser les populations de cicadelles » préviennent les deux experts), la lutte par faune auxiliaire et surtout le Pyrévert. En accord avec la réglementation européenne (réglement n°889/2008), le pyrèthre naturel est le seul insecticide autorisé pour lutter biologiquement contre la cicadelle. Actuellement, la seule préparation commerciale disponible en France est le Pyrévert, dont les résultats ne sont plus à démontrer. Comme Nicolas Constant le déclarait il y a un mois à Vitisphere, « l'efficacité du pyrèthre naturel (75 % au premier passage, 87 % au deuxième et 99 % au troisième) alliée à l'absence de résidus et à une faible rémanence en font le meilleur compromis compte-tenu de l'absence de résidus qu'il laisse dans les vignes ». Des expérimentations en Saône et Loire laisseraient également penser que le Pyrévert est sélectif des typhlodromes, son utilisation n'affectant pas les populations de cette faune auxiliaire (mais « attention aux abeilles, il ne faut pas traiter en leur présence ! » alerte la plaquette).
Pour être pleinement efficaces, les traitements au Pyrévert doivent cependant être réalisés en prenant en compte quelques précautions d'utilisation, rappelées par Nicolas Constant et Josquin Lernould, comme un épamprage préalable, un maximum de trois traitements par saison, un réglage pointu du matériel de pulvérisation... Cette synthèse lève également certaines idées préconçues sur le Pyrévert. Ainsi, et même si elle sont « présumées plus efficaces, des applications de pyrèthre plus précoces que celles préconisées [n'apportent] aucun gain d’efficacité », bien « au contraire, avancer leur positionnement présente un fort risque de ne pas couvrir l’ensemble des éclosions ». La dilution excessive et les mélanges avec du cuivre et/ou du soufre sont de plus fermement déconseillés (il y a des risques de phytotoxicité et de perte d'efficacité). Il est également à noter que « malgré la photosensibilité du pyrèthre, l’heure de traitement n’influence pas l’efficacité du produit. »
[Illustrations : photos des stades larvaires de la cicadelle dorée, tirés du mémoire de fin d'études Tiphaine Roche]